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sous-marins. Fréquemment ils canonnent ces derniers ou sont canonnés par eux. Quant aux paquebots, ils transportent les troupes et les provisions, ils sont la proie offerte à la torpille. Mais ils se défendent par leur étrave et souvent par leurs canons. : Puisqu’on leur fait la guerre, ils la font à leur tour.

Car il a bien fallu, devant la menace inhumaine du fameux blocus sous-marin, donner des armes pour se défendre aux malheureux bateaux de commerce, exposés à être coulés sans avertissement, ou tout au moins à voir leur équipage et leurs passagers abandonnés en pleine mer dans de frêles embarcations. L’expérience a montré que là était leur salut : rares ont été les victimes du sous-marin parmi les bâtimens armés de canons, et nombreuses parmi les autres. De gré ou de force, encore une fois, le marin civil devient un combattant.

A l’armement d’un certain nombre de cargos, les Allemands ont répondu de deux façons : par la déclaration officielle qu’ils n’hésiteraient plus désormais à les couler sans avertir et par la préparation d’un nouveau type de sous-marin à tourelles blindées, qu’ils ont essayé de mettre à l’épreuve des petits-projectiles. Les premiers canons installés sur la flotte marchande furent en effet des canons légers et d’un calibre restreint. Avec l’apparition de ces sortes de monitors sous-marins qui, en demi-émergence, n’exhibent que leurs tourelles et le kiosque de commandement, il faut aujourd’hui généraliser l’emploi de calibres un peu plus forts : 100 millimètres, 120 millimètres, 140 millimètres. Ainsi se reproduit dans la guerre sous-marine la lutte sans fin entre la protection et le projectile.

Elle se poursuit aussi sous une autre forme. Les marines militaires, menacées par la torpille automobile ou par la mine, ont cherché à réaliser des bâtimens à coque protégée sous la flottaison. Le progrès, dont nous montrions naguère la nécessité, s’amorce déjà. Sans entrer dans des détails qu’il ne convient pas de révéler encore, on peut signaler une application qui a été décrite dans la presse. Il s’agit des monitors inaugurés dans les Dardanelles. Le Daily Mail du 20 octobre 1915 les dépeint comme il suit : « L’arrivée du troisième de ces navires fit sensation non seulement chez l’ennemi, mais aussi parmi nos troupes. Un après-midi, un objet flottant, d’aspect extraordinaire, parut à l’entrée du port de Kephalos. Il semblait qu’au lieu de faire route en ligne droite, il gagnait le mouillage