Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 32.djvu/230

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

négligeables. On s’est demandé notamment si la suppression des grosses mottes que produit la charrue est désirable ou du moins nécessaire. Le gel a en effet pour résultat, à cause de l’augmentation de volume que réalise l’eau en passant à l’état de glace, d’émietter les grosses mottes en particules beaucoup plus petites. C’est exact, mais, d’une part, la division du sol est alors beaucoup moindre et moins régulière qu’avec les appareils effriteurs. En outre, il est peut-être imprudent de confier l’aération du sol aux vicissitudes de la météorologie hivernale. Il se peut, en effet, qu’il ne gèle pas ou peu. En outre, il gèle très rarement dans un grand nombre de pays cultivés, notamment sur les rives de la Méditerranée. S’il ne gèle pas, l’air ne pénètre pas, et la motte n’est pas délitée. Enfin, l’argument ne porte guère que sur les blés de printemps qui n’entrent que pour une très faible part dans les emblavures françaises, puisque, dans la moyenne de cinq des dernières années, la proportion des blés de printemps, dans la totalité des surfaces ensemencées de blé, ne dépasse pas 4 p. 100 [1].

On a fait un certain nombre d’objections analogues, qui sont toutes fondées sur des argumens a priori. En ne se cantonnant pour un instant que dans le domaine théorique, on))eut y répondre qu’un type d’instrument établi conformément aux idées et aux désirs de ce grand agronome que fut Dehérain, ne peut pas choquer les théories qu’il connaissait toutes fort bien. L’expérience seule, « source unique de toute vérité, » peut permettre finalement de se prononcer dans cette controverse. Or, d’expérience concluante, suivie, scientifique et suffisamment vaste, il n’en a pas encore été fait. Les résultats des essais partiels et comparatifs auxquels on a procédé appellent des réserves nécessaires qui permettent de les interpréter dans un sens ou dans l’autre... On n’y a pas manqué. Il faut donc souhaiter que des expériences parfaitement définies, et réalisées dans des conditions excluant toute discussion, soient poursuivies à bref délai dans ce domaine, concurremment avec les essais de motoculture dont M. Fernand David a eu l’heureuse initiative, et dont il sera question dans une prochaine chronique.


On concevra l’importance de la question posée, si on veut bien se

  1. Il convient d’ailleurs de remarquer que les adversaires les plus déterminés des effriteuses en reconnaissent la grande utilité pour les pays de sécheresse et de chaleur, pour ceux où on doit pratiquer le dry f’arming.