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l’installation des tentes pour abriter les boulangers et la paneterie, à la pose des voies Decauville, et passer des marchés pour l’évacuation des braises produites en énorme quantité par les fours travaillant jour et nuit, ou encore pour l’enlèvement des issues là où devait fonctionner un abattoir, etc.

En même temps, les immenses magasins de la station, qui vont se remplir des denrées les plus diverses, commencent par se vider de tout ce qui y a été entassé dès le temps de paix en vue de la guerre. Là spécialement où le siège de la station-magasin coïncidait avec celui d’un escadron du train des équipages, ce fut pendant plusieurs jours un défilé ininterrompu de voitures de toute espèce, voitures des convois administratifs et de la boulangerie de guerre, voitures d’ambulance, etc., sans compter parfois un grand nombre de voitures des services de l’artillerie et du génie, remisées en temps de paix dans les locaux libres, qu’elles doivent rapidement évacuer pour permettre l’installation des services de la station-magasin. En même temps avait lieu le défilé des dizaines de milliers de chevaux de réquisition destinés à atteler toutes ces voitures. Il y eut alors plus d’un départ mouvementé, plus d’une roue ou d’un timon brisés par des chevaux trop vifs ou mal conduits, mais qui allaient bientôt, comme les hommes, prendre l’habitude de la vie en commun, pittoresquement campés en attendant leur départ sur une place publique ou en plein champ ; bien vite d’ailleurs, leur première ardeur allait se trouver calmée par les longs et monotones trajets à faire sur les routes poudreuses et ensoleillées de l’été de 1914, en attendant les fondrières et l’horrible boue de l’hiver suivant.

Peu à peu, ce mouvement devait se régulariser, mais en restant toujours presque aussi intense. La station-magasin allait commencer à jouer son rôle normal, recevant d’abord ou fabriquant elle-même les approvisionnemens nécessaires à l’armée à laquelle elle est affectée, et les réexpédiant ensuite sur cette armée. Avec la gare régulatrice, sur laquelle elle les expédie directement, elle constitue comme le cœur de cet immense organisme, la pièce maîtresse du mécanisme destiné à assurer le ravitaillement d’une armée déterminée. Elle se trouve pour cela reliée d’un côté aux services du territoire, à l’intendance régionale notamment, chargée de se procurer une partie de ces approvisionnemens, lourde tâche qu’elle a remplie