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mais chacun conserve les aptitudes ancestrales dues aux conditions de vie, résultant du sol et du climat du pays depuis de longs siècles habité par ses aïeux. C’est de cette double considération que devront s’inspirer ceux auxquels incombera la tâche de la reconstitution, de la réorganisation économique de la France.

À cette œuvre, les Pyrénées peuvent apporter une très utile contribution au point de vue industriel et agricole.

Industrie et agriculture, dans la montagne pyrénéenne comme dans la plaine subpyrénéenne, dépendent d’un seul et même facteur, l’eau. Sans elle nos montagnes et nos plaines seraient stériles, nulle industrie ne pourrait, dans des conditions suffisamment rémunératrices, essayer de s’y établir. Il importe donc, par-dessus tout, de savoir quelle est la puissance de l’eau qui ruisselle sur le flanc de nos montagnes.

M. Marchand, directeur de l’observatoire du Pic du Midi, dans son étude sur l’Énergie mécanique totale des eaux sur le versant français des Pyrénées s’exprimait, en 1903, dans les termes suivans : « Voici les résultats auxquels on arrive : déduction faite de l’évaporation, l’énergie totale des eaux qui descendent sur le versant des Pyrénées est, en chiffres ronds, de 8 millions de chevaux-vapeur.

« On s’en fera une idée plus concrète en remarquant qu’elle correspond au travail de 26 000 locomotives (supposées de 300 chevaux chacune) circulant jour et nuit.

Quant à l’énergie pratiquement utilisable, il est fort difficile de l’évaluer : ce mot pratiquement n’a en effet qu’un sens tout relatif, une telle chute d’eau considérée actuellement comme difficile à exploiter sera peut-être utilisée dans la suite des temps, lorsque toutes les chutes placées dans de meilleures conditions auront été successivement mises au service de l’industrie. Le fait à retenir pour le moment est que la houille blanche, dans les Pyrénées françaises, développe assez d’énergie pour mettre en mouvement un nombre colossal d’usines. »

Depuis l’époque à laquelle M. Marchand écrivait ces lignes, une nouvelle expression a été employée pour, dans certaines conditions déterminées, désigner l’eau servant de force motrice. M. Henri Bresson, un des premiers, sinon le premier, a remplacé le nom de houille blanche par celui de houille verte pour l’eau destinée à produire la force hydraulique dans les moyennes