Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 31.djvu/850

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Westphalie ou de la Saxe. Les préoccupations furent vives en Allemagne. Allait-on perdre la maîtrise de la Baltique ? Il semblait qu’il dût suffire pour cela qu’au gros de la flotte russe, dont la valeur s’était affirmée en Courlande, se joignit une grande escadrille de light armoured cruisers (croiseurs cuirassés légers, type Arethusa et Calliope) et de « destroyers » ou grands torpilleurs anglais, tous navires d’assez faible tirant d’eau pour franchir le Sund sans être arrêtés par les « basses » de 6 mètres. L’Office allemand de la marine, ayant cru savoir qu’il était en effet question d’une jonction de ce genre, prit brusquement le parti de faire barrer, sans aucun souci de la neutralité danoise et suédoise, la partie méridionale du Sund par un champ de mines automatiques. Mal mouillés sans doute, ces engins dérivèrent dans la Baltique, coulant indistinctement Allemands et neutres, navires de guerre et paquebots. Il fallut les recueillir, les draguer, les faire exploser. Un peu après, une nombreuse flottille de bâtimens légers allemands franchissait le détroit et s’élançait dans le Cattégat à la rencontre de cette force navale britannique qui, en réalité, ne vint pas et peut-être n’avait jamais dû venir. Mais, peu à peu, la mauvaise saison aidant, les patrouilles organisées par la marine allemande dans la moyenne Baltique obligèrent les sous-marins anglais et russes à rentrer à Reval. Leur fructueuse campagne était momentanément suspendue, et il devenait difficile aux Alliés de parler du blocus effectif de la côte ennemie. L’argumentation américaine reprenait donc toute sa valeur au moment où il eût été le plus utile qu’elle la perdit ; et c’est encore là qu’en sont les choses sur ce point capital.


Entre temps et à la suite de nouveaux torpillages de paquebots sans avertissement préalable, exécutés dans la Méditerranée, le gouvernement de l’Union avait renouvelé ses protestations, ses enquêtes, ses demandes d’explications. Il reprenait même l’affaire de la Lusitania et, indigné que l’Allemagne se bornât dédaigneusement à offrir une indemnité pécuniaire aux familles des victimes américaines, il exigeait que le commandant du sous-marin fût désavoué et puni. Enfin, ces jours derniers (29 janvier), le président Wilson faisait connaître d’une manière positive ses vues au sujet de quelques-unes des