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quand l’aisance de la famille lui permet de s’en passer. Nous ne pensons pas qu’on l’admette. Mais inversement, on en déduira qu’on doit, lorsque la pension est nécessaire, la proportionner aux besoins des survivans. On se dispose à majorer la pension modique de la veuve en raison du nombre des orphelins restés à sa charge. Cela semble raisonnable, et tout le monde y peut souscrire.

Autrement angoissant est le problème moral. Non, certes, que nos institutions civiles et publiques soient ici prises au dépourvu. Il existait des orphelins avant que la guerre ait massacré des pères de famille. Le Code civil, conservateur de nos vieilles coutumes, continuateur de nos traditions familiales, a maintenu pour eux l’institution de la tutelle, minutieusement réglementée, théoriquement satisfaisante. Comme, d’autre part, l’expérience a révélé l’inefficacité de cette protection pour les orphelins dépourvus d’une famille même élémentaire, nos lois administratives sont venues au secours de ces derniers en instituant un succédané de la tutelle civile : c’est la tutelle nationale exercée par les services départementaux d’assistance publique.

Tutelle familiale, tutelle nationale, cela ne suffit-il pas ? Ne trouvons-nous pas dans l’une ou dans l’autre, suivant les espèces, les secours matériels et les moyens d’éducation que réclament les orphelins de nos défenseurs ? On répond unanimement : Non !

Il faut mettre en lumière la raison de cette unanimité pour faire saisir la complexité du double problème qui sollicite l’attention du législateur.

Il faut rappeler pourquoi la tutelle du Code civil ne suffit pas pour sauvegarder les droits des orphelins demeurés sous la garde de leurs proches. Il faut indiquer les motifs qui ne nous permettent pas de demander aux institutions d’assistance publique l’aide nécessaire aux orphelins restés sans famille.


La tutelle civile n’apparaît dans notre pratique moderne que comme une formalité juridique principalement destinée à la conservation du patrimoine.

Théoriquement, les dispositions du Code civil sont