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Chambre des Communes un projet de loi, le Military Service Bill.

Bien que partisan du volontariat, disait-il, il regardait la loi comme nécessaire : mais il n’y avait pas lieu, à son avis, d’établir une obligation générale. Aussi le Bill comportait-il de nombreuses restrictions.

Tout d’abord, il ne s’appliquait qu’aux célibataires entre dix-huit et quarante et un ans.

Il ne s’étendait pas à l’Irlande : une population de plus de cinq millions d’habitans échappait ainsi à cette charge.

La durée du service était limitée à la durée de la guerre.

Un droit d’appel était ouvert aux hommes astreints devant trois juridictions successives : comités locaux, tribunaux régionaux et tribunal suprême.

Enfin le Bill était corrigé par un certain nombre d’exemptions dont les principales portaient sur les membres du clergé.

Les hommes reconnus nécessaires au travail national, les soutiens de famille ou ceux qui laisseraient des parens sans soutien : exemple, le dernier fils d’une mère dont les autres auraient été tués.

Enfin ceux qui font valoir une « objection de conscience » (consciencious objectors).

Cette dernière disposition, qui nous paraît singulière, s’explique par l’importance que prennent les questions religieuses en pays anglo-saxon : elle était imitée de la loi militaire australienne. Sont qualifiés consciencious objectors ceux qui prouvent devant l’autorité compétente que leurs croyances ne leur permettent pas de porter les armes. On sait que la secte des Quakers, entre autres, professe cette répulsion.

L’intéressé devra toutefois prouver que son objection est authentique, et n’a rien de commun avec une « conversion » de circonstance.

Le Military Service Bill, on le voit, comportait nombre de dérogations et de tempéramens, — excluant même de son intitulé les mots d’obligation ou de compulsion, — pour rendre moins sensible à la nation anglaise le renoncement à sa liberté la plus chère.

Le même jour, s’adressant à la Chambre des Lords, lord Kitchener déclarait :

« Il est nécessaire que l’engagement pris par le premier