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Ainsi, à la veille du grand conflit, le Cabinet de M. Asquith demeurait nettement hostile à toute augmentation des forces militaires de l’Empire, et il donnait la preuve de son pacifisme aveugle en refusant d’augmenter les charges financières incombant à la défense nationale. Dans les crédits militaires votés pour l’année 1913-14, le budget de la marine ne comportait qu’une légère augmentation de 30 millions sur un total de 1 milliard 157 millions, — et celui de l’armée un accroissement de 9 millions, insignifiant sur un chiffre de 705 millions.

Contraste saisissant avec le développement énorme des forces militaires allemandes, — avec le grand effort patriotique et financier que la France s’imposait au même moment par la loi de trois ans, — et que peut seul expliquer un singulier manque de clairvoyance chez les dirigeans de la nation anglaise.


C’est dans cet état d’unpreparedness que la guerre éclata et surprit nos voisins d’outre-Manche beaucoup plus encore que nous-mêmes. Ainsi, au mois d’août 1914, l’organisation des forces militaires de l’Empire était la suivante :

La Regular Army, organisée en corps expéditionnaire, appelé un peu pompeusement la striking force (force frappante), susceptible d’être rapidement transporté sur le continent à l’effectif de 160 000 hommes. La moitié seulement, croyons-nous, put être débarquée à temps dans le courant du mois d’août, pour prendre part aux opérations dans le Nord et à la bataille de la Marne.

La Territorials force, — qu’il ne faut assimiler en rien à nos territoriaux, — exclusivement composée de volontaires appelés à la défense de l’ile, et ne pouvant être astreints sans leur consentement exprès à combattre en dehors du Royaume-Uni. Péniblement mise sur pied en 1908, elle ne comprenait que des hommes ayant suivi quelques séances de drill (exercice) et accompli dans les camps de courtes période d’instruction (training) de une à deux semaines : presque entièrement dépourvue de cadres et de matériel, théoriquement chiffrée à 300 000 hommes, mais n’ayant jamais dépassé l’effectif de 260 000, cette force ne pouvait constituer qu’un embryon d’armée. Il semble que lord Haldane lui-même, son créateur, ne