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LES AMBITIONS COLONIALES
DE L’ALLEMAGNE

Chaque semaine, depuis quelques mois, nous apprend de nouveaux succès des héroïques petites troupes anglaises, belges ou françaises, qui luttent pied à pied sur le continent noir pour briser le rêve terrible d’hégémonie mondiale dont les pangermanistes avaient empoisonné l’Allemagne. Ici même, leurs premiers exploits ont été retracés éloquemment. Tour à tour tombe sous nos coups la résistance de ces domaines variés que Bismarck avait accepté de revendiquer comme allemands par une sorte de concession politique à des ambitions nationales désapprouvées par lui, mais que bientôt ces ambitions démesurément accrues ne devaient plus considérer que comme les pierres d’attente d’un immense édifice à construire. Du prince de Bismarck à M. de Bethmann-Hollweg cette évolution des aspirations germaniques vers une plus grande Allemagne, non plus européenne mais mondiale, a été si complète et si profonde dans l’esprit public d’outre-Rhin, que la guerre de 1914 a pu être présentée à l’opinion allemande comme une émancipation nécessaire de la tutelle franco-anglaise, qui entravait insupportablement, en Orient comme en Afrique, les destinées merveilleuses de l’Empire. Au même titre, et souvent plus encore que les déclamations sur le péril slave et la fragilité anormale des frontières de l’Ouest, les exposés tendancieux et souvent de