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ne pourrez plus résister, a demandé finalement le correspondant de l’Associated Press, que ferez-vous ? » — « Nous démobiliserons l’armée, a répondu le Roi, et nous n’aurons qu’à attendre la marche des événemens. Que pouvons-nous faire d’autre ? » Il faut convenir que cela n’est pas pour nous bien effrayant.

Nous espérons d’ailleurs que, ni d’un côté ni de l’autre, on n’en viendra ù des extrémités que le roi Constantin n’avait pas entrevues lorsqu’il causait plus posément avec le correspondant du Times. Il avait eu alors l’accent moins tragique et ne s’était pas privé d’y mettre quelque ironie. Faisant allusion aux demandes des Alliés : « Nous avons répondu, avait-il dit, en donnant les assurances les plus formelles, qu’ils ne devaient craindre, de notre part, aucun acte malveillant. Mais avant que nous puissions nous lier à un programme fixe et irrévocable, nous sommes désireux de connaître celui que les Alliés ont tracé pour eux-mêmes. On nous répond que l’Angleterre et les Alliés délibèrent en ce moment, mais que, jusqu’à présent, aucun programme définitif n’a été établi. La Grèce peut-elle, en toute justice, être poussée à prendre des mesures de l’importance politique et stratégique la plus haute, dans ces conditions ? Peut-elle, en toute justice, être obligée à transférer ses troupes dans un autre district, tant que les Alliés ne seront pas arrivés à une décision sur le point de savoir s’ils occuperont et tiendront la région évacuée par nous ? » Ceci nous ramène à la question que nous n’avons pas perdue de vue depuis le commencement de notre chronique, et pourquoi ne pas avouer que le Roi ne la pose pas autrement que nous ? S’il est vrai, comme il le dit, que l’Angleterre et ses alliés ne savent pas encore s’ils resteront à Salonique, s’ils n’en sont pas tout à fait sûrs, s’ils n’y sont pas absolument décidés, que signifie cette négociation décevante, où nous manifestons aujourd’hui des exigences dont nous n’aurons peut-être rien à faire demain ? Le moment est venu de prendre une décision définitive, au sujet de laquelle l’Angleterre et ses alliés prononceront ce : Jusqu’au bout ! qui est notre règle ailleurs. Le roi Constantin ne pourra plus alors nous opposer son scepticisme sur nos intentions. Mais pas de demi-mesures, qui seraient ici pires que tout ! Nous comprenons les partisans de l’occupation, nous ne comprenons pas moins les partisans de l’évacuation. Si les uns ont raison et si les autres se trompent, leurs systèmes sont du moins également logiques ; toutes les parties se tiennent et ils ont eux-mêmes l’avantage, qui parait devenir de plus en plus rare, de savoir exactement ce qu’ils veulent. Mais il y a une solution intermédiaire