Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 30.djvu/902

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en 1885 et achevés en 1888 ; la communication directe fut alors assurée entre Vienne et Salonique, entre Vienne et Constantinople avec bifurcation à Nich. Les sections de ces lignes situées en Serbie et en Bulgarie appartenaient au réseau d’Etat de chacun de ces pays ; le raccordement Uskub-Zibeftché était exploité par la Compagnie des Orientaux.

L’entrée en service de ces nouveaux chemins de fer n’avait pas été sans inquiéter le gouvernement ottoman ; il est clair que ces facilités de communication plaçaient les principautés balkaniques sous la dépendance de l’Autriche, dont les projets sur Salonique étaient connus de toutes les chancelleries ; comment parer à la menace possible d’une armée autrichienne, traversant la Serbie sans peine, à l’aide des chemins de fer dont la politique obstinée de Vienne avait fini par obtenir la construction ? L’idée vint alors aux Turcs de construire, parallèlement à la côte de la mer Egée, un chemin de fer qui fût exclusivement à eux ; soudé, par Dédéagatch, à l’embranchement des Orientaux qui relie ce port à Andrinople, il atteindrait, à l’Ouest, Salonique ; ainsi seraient rattachées Constantinople et Salonique, les ports actifs de l’Empire en Europe, les deux principaux chefs-lieux militaires. Une Compagnie française fut chargée de la construction de cette voie, connue sous le nom de « Jonction Salonique-Constantinople ; » la Porte lui garantit une recette brute de 14 000 francs par kilomètre. Le tracé fut établi sur la plus grande partie assez loin de la mer, par crainte des dangers de bombardement et d’occupation. La ligne de Jonction traverse les districts riches de la Macédoine, Xanthi, Drama, Serrés réputés pour leur tabac et où l’on plante maintenant des cotonniers ; elle laisse au Sud les villes maritimes de Porto-Lagos et de Cavalla. Elle a été complétée par deux raccourcis qui, s’embranchant dans l’intérieur sur les lignes Dédéagatch-Andrinople et Salonique-Uskub, permettent de Constantinople en Serbie une circulation directe, sans les détours de Dédéagatch et de Salonique.

Dans les dernières années du XIXe siècle, une Compagnie à capitaux allemands, très liée avec celle des Orientaux, a construit au départ de Salonique un autre chemin de fer, celui de Monastir ; cette voie prépare évidemment l’union entre le littoral de la mer Egée et la rive albanaise du canal d’Otrante. Elle indique aussi l’un des nouveaux desseins du germanisme, qui