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prononcé devant M. Salandra qui le sanctionnait par sa présence, devant un très grand nombre de députés et de sénateurs, enfin devant une foule immense venue de tous les côtés pour l’entendre et pour l’applaudir, si ce n’est pas encore un acte, c’en est l’annonce et nous ne mettons pas en doute qu’il viendra bientôt. Jamais la solidarité qui unit tous les Alliés dans une même cause n’avait été affirmée avec plus de force. « Aucune personne de bon sens, s’est écrié l’orateur, ne croira que notre victoire puisse être isolée et indépendante de la victoire de nos alliés, et aussi que nous puissions envisager une paix isolée. La formule : « Tous pour un, un pour tous! » ne s’appuie pas seulement sur des raisons de dignité nationale ni sur de hauts sentimens ethniques, mais encore sur des réalités qui apparaissent chaque jour plus puissantes. » Quoi de plus vrai? Il faudrait plaindre autant que flétrir celui des Alliés qui, manquant au pacte signé par tous, croirait pouvoir faire une paix séparée. Cette paix lui attribuerait peut-être des avantages appréciables, mais, certes, elle ne les lui assurerait pas, car ils lui seraient enlevés un jour, à l’applaudissement de tous ceux qu’il aurait abandonnés et trahis. Dieu merci, rien de pareil n’est à craindre. En outre, l’Italie proteste contre l’idée que son intervention pourrait être déterminée par ses intérêts exclusifs dans les champs où elle s’exerce. « Notre abstention, comme notre intervention aux Balkans, a dit M. Orlando, ne saurait dépendre d’une autre raison que de l’appréciation de ce qui convient le mieux pour atteindre le but essentiel d’une commune victoire par la solidarité la plus absolue, la plus étroite, la plus cordiale avec les ennemis de nos ennemis. » Ce sont là de nobles paroles : elles ont retenti dans tous les pays alliés et nous en attendons l’effet avec confiance. Rien, en effet, n’obligeait le gouvernement italien à prendre devant le monde un engagement aussi solennel : s’il l’a fait, c’est après réflexion et à bon escient. La parole de l’orateur de Palerme a été comme échauffée et même enfiévrée par la pensée du dernier crime que l’Allemagne a commis, le torpillage de l’Ancona. Nous disons l’Allemagne plutôt que l’Autriche, parce que, quand bien même un sous-marin autrichien aurait été l’instrument de l’attentat, — ce que nous ne croyons d’ailleurs pas, — c’est l’Allemagne qui a créé la méthode et donné l’exemple. On sait que l’Ancona était un paquebot italien qui transportait en Amérique quelques centaines d’émigrans pauvres, hommes, femmes, enfans inoffensifs, dont les cadavres sont maintenant au fond des flots. Soit dit entre parenthèses et sans commentaires