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paisible que nourrissaient leurs aînés avant la guerre ? C’est là une préoccupation que j’ai vu exprimer maintes fois. Nous ne sommes pas les seuls à nous soucier de ce problème. Les Allemands y songent, eux aussi, et s’attribuant la victoire prochaine, ils concluent que la guerre peut rapporter immédiatement ce que la paix n’aurait probablement donné qu’au prix de longs et patiens efforts diplomatiques, — un grand Empire allemand en Afrique. Tel est leur rêve. Paul Rohrbach, une autorité berlinoise en matière coloniale, affirme, dans une brochure récemment imprimée à Stuttgart, que l’Allemagne s’annexera demain le Congo belge et l’Angola. Il ajoute que « ces pays offrant une pâture insuffisante aux millions de ses compatriotes qui seront naturellement amenés à exercer leur activité sur le continent noir, il faudra que les traités leur attribuent beaucoup d’autres lieux et, du Sénégal au Nil, des hauts plateaux propres à l’agriculture ; » — mais, écrit-il, « ces visées-là, nous préférons ne pas les divulguer encore. »

A notre tour, nous disons que vers les colonies doivent s’orienter nos projets d’avenir. Dans ces contrées immenses et si riches, nos activités galvanisées par la vie militaire, trouveront un développement bien rémunéré. Les épreuves que nous traversons auront fortifié chez nous l’esprit d’entreprise. En sortant des tranchées, il nous faudra un horizon plus étendu. Mais ce sera la tâche de demain, et nous pensons qu’il suffit aujourd’hui de la laisser entrevoir.


CHARLES STIENON.