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« Je ne vois, dit-il, que de dangereuses erreurs dans le discours précédent.

« Il n’est personne qui ne sache que le maximum avait tué le commerce et organisé la famine. L’expérience du passé vous a éclairés : vous ne vous laisserez pas entraîner par des déclamations ; vous ne retomberez plus dans les erreurs. » (Non ! non ! S’écrie-t-on de toutes parts, en applaudissant.)

Ce même jour, le 4 nivôse an III, l’Assemblée votait un décret dont le premier article était ainsi libellé :

« Toutes les lois portant fixation du maximum sur le prix des denrées et marchandises cesseront d’avoir leur effet à compter de la publication de la présente loi. »

C’était là une loi de principe. La Convention reconnaissait implicitement qu’elle avait commis une erreur, violé des droits et nui aux intérêts de la nation en cherchant à les servir. Elle voulut faire plus et elle s’adressa au pays, — ouvertement, loyalement, — pour avouer ses fautes et combattre d’avance les opinions dont elle s’était inspirée dans le passé.

Au cours de la séance du 9 nivôse an III, Johannot lisait et faisait approuver par l’Assemblée une proclamation au peuple français :

« La raison, dit-il, l’équité, l’intérêt de la République réprouvaient depuis longtemps la loi du maximum. La Convention nationale l’a révoquée, et plus les motifs qui ont dicté ce décret salutaire seront connus, plus elle aura de droits à votre confiance. »

Tous ceux qui seraient tentés demain de taxer les subsistances feront bien de poursuivre cette lecture. C’est encore la Convention, éclairée par l’expérience, qui leur dira :

« Plus cette loi était sévère, plus elle devenait impraticable ; l’oppression prenait en vain mille formes : elle y rencontrait mille obstacles. On s’y dérobait sans cesse, ou elle n’arrachait que par des moyens violens et odieux des ressources précaires qu’elle devait bientôt tarir. »

On nous a parlé hier encore de l’impuissance du commerce libre. A propos d’un prétendu déficit de la récolte de blé en 1915, un publiciste, d’ordinaire mieux inspiré, ne craint pas de dire :

« Il est indispensable que le gouvernement envisage dès maintenant les conséquences de cette moins-value, car la libre