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on entendait une musique bruyante et animée, tout avait un air de fête ; le Prince avait voulu avoir un orchestre pour son bal, pourtant peu nombreux.

Samedi 21 mai.

La Princesse, satisfaite de ses succès de la veille, m’a abordée gracieusement, mais n’a pu sans humeur entendre, à déjeuner, ce que l’on a dit sur la beauté de Mlle  Merele et Mme  de Zeppelin. Le Prince, en épousant une enfant de seize ans qu’il pourrait corriger, prend pour lui plaire, au contraire, tous ses défauts ; il rappelle à Mlle  de Perrigny ses devoirs, et je disais hier à M. Conneau que cela me faisait de la peine de voir le Prince devenir si moqueur que personne n’y échappe, pour faire rire sa cousine, dont c’est le bonheur, tandis que, l’année passée, il faisait un si grand grief à la princesse Théodolinde d’avoir dit un mot sur M. Roux. Mais il est amoureux, et cela répond à tout…

Le soir, la Reine ne m’a parlé que des projets du Roi sur Gottlieb… Je suis descendue à dix heures pour les emballer. J’ai trouvé le Prince dans l’antichambre. J’ai admiré le pommeau de sa canne. C’est une tête de chien en or faite à merveille. Elisa m’avait conté qu’en la lui remettant, sa cousine lui avait dit : « Faites bien attention que c’est le symbole de la fidélité… » Il m’a dit que c’était son oncle qui la lui avait donnée… Il m’a parlé les larmes aux yeux de la peine que lui causait la résolution de M. Conneau, de retourner à Florence, il craint qu’il ne s’en repente… La Reine était la première en voiture. La Princesse est arrivée en courant, en disant à son cousin combien elle trouvait joli un dessin d’une petite cassette qu’il venait de lui porter. J’ai encore causé un moment avec le Roi. Il allait à Constance. M. Conneau m’a dit que plus il réfléchissait aux offres qu’on lui faisait de rester dans le pays, plus il voyait qu’il y aurait folie à lui de les accepter ; que le Roi n’achèterait rien et ne demeurerait jamais ici. Le Prince, une fois marié, n’y resterait pas non plus, et la Reine elle-même n’était pas bien sûre de ce qu’elle ferait.

J’ai vu les amoureux partir pour Hourhein et la Reine seule se promener. Je l’ai rejointe, et nous avons causé longtemps. Je lui ai lu le projet de biographie du Prince qu’elle m’avait demandé de faire et qu’elle envoie à M. Buchon. Il ne vient