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Romazzotti, qui vient de mourir prématurément après une belle et utile carrière, puis les quatre unités du type Farfadet, construits d’après les plans de M. l’ingénieur Maugas ; et la valeur de ces types, très étudiés, eût peut-être balancé la fortune du submersible, si celui-ci, très combattu un moment, n’eût reconquis toute la faveur des marins lorsque se dessina le mouvement qui les entraînait presque tous, et dans tous les pays, à n’attacher d’importance qu’à la guerre d’escadres et de valeur militaire qu’aux grands cuirassés.

C’est que, de ces grands cuirassés, le submersible pouvait devenir l’utile auxiliaire dans l’une ou dans l’autre des phases de cette décisive bataille rangée en haute mer, unique préoccupation de tant d’esprits distingués. Il le pouvait justement parce qu’il était capable de suivre les cuirassés, ou que, du moins, il léserait bientôt, quand on aurait augmenté son déplacement, — ce qui ne tarda guère, — parce qu’il était capable de naviguer dans les mers d’Europe, tout comme le « destroyer, » dont il n’était après tout qu’une variante ; parce qu’on le voyait toujours, qu’il était toujours là, sous la main du chef ; parce que, si on en multipliait les exemplaires, on en formerait des groupes, des escadrilles commandées par un officier supérieur et qui feraient de belles évolutions, comme les cuirassés eux-mêmes ; et puis, qui sait ? des flottilles, que dirigerait un officier général monté sur un bâtiment de surface.

La conception était séduisante. Elle se réalisa. La guerre vint, qui ne ressemblait point du tout à ce que l’on avait imaginé : point de bataille rangée, point de belle canonnade, pendant laquelle ou après laquelle on aurait lancé les submersibles, — en plongée, cette fois, — soit pour désorganiser l’adversaire, soit pour achever les unités blessées… Au contraire, des escadres de « dreadnoughts, » immobilisées dans des rades défendues, se défiant de loin les unes les autres comme les héros d’Homère, déclarant chacune qu’elle « paralysait » la flotte adverse, et sans doute ayant toutes raison de le dire…


Dans ce singulier « processus » stratégique, le submersible d’escadre et surtout les escadrilles de submersibles perdaient tout d’un coup le plus clair de leur raison d’être. On ne conçoit les sous-marins naviguant à la queue leu leu, en surface,