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nul. Telle était du moins l’apparence aux yeux des Allemands comme aux nôtres. En réalité, cependant, ils avaient acquis des résultats riches d’un avenir insoupçonné.

En 1898 apparurent les premiers épis de ces longues semailles. Le 6 mars de cette année, l’Allemagne obtenait en Chine une concession importante. Ici même, M. Daniel Bellet publiait, le 1er mars dernier, l’histoire de Tsing-Tao. Je n’y reviendrai donc pas, me contentant de noter, pour l’utilité des pages qui suivront, cette date et la cession à bail faite au gouvernement de Berlin de tout le territoire adjacent à la baie de Kiaou-Tchéou. L’Allemagne avait réalisé en Chine sa première ambition exotique.

Après Kiaou-Tchéou, acquis le 6 mars 1898, l’année 1899 voyait les îles Mariannes et Carolines passer des mains de l’Espagne dans celles des Allemands. L’Angleterre et les Etats-Unis, cette même année, acceptaient la domination germanique sur la plus grande partie des îles Samoa.

En 1904 et 1905, les espérances de l’Allemagne connurent des jours remplis d’anxiété. Dans l’Afrique du Sud-Ouest et en Afrique orientale, un souffle de révolte passa sur les populations indigènes. Des heures sanglantes marquèrent cette époque dont la propagande coloniale allemande eut d’ailleurs raison, après avoir surmonté les plus grandes difficultés.

A partir de l’année 1906, sous la puissante impulsion d’un homme cher à Guillaume II, l’Allemagne doubla les étapes dans la voie nouvelle ouverte à ses prétentions. M. Dernburg, doué d’un esprit audacieux et dénué de scrupules, pratiqua résolument une politique réaliste, étiquetée d’un mot nouveau : « Zielbewusst. »

A partir de 1907 et pendant les années suivantes, l’Allemagne se lança dans la construction des voies ferrées. Le rail germanique se glissa partout. L’ingénieur devança le métallurgiste, suivi lui-même de l’exportateur préparant les bases de comptoirs nouveaux, dont le nombre ne cessa d’aller croissant. Dans la Métropole, les sociétés coloniales se fondèrent. Ce fut la ruée des hommes allemands et de l’argent allemand à la conquête du monde.

Parallèlement à ces efforts, différens, mais concertés, la marine marchande et la flotte de guerre devenaient l’objet des soins toujours plus attentifs du gouvernement.