Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 30.djvu/151

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pour les parties qui seroient réservées ainsy que j’ay dit ci-dessus, je les livre, non seulement à l’étude et à l’instruction particulière des médecins et chirurgiens qui se trouveront auprès de moy, mais je consens, soit à l’Académie des Sciences ou aux amphithéâtres publics, si les circonstances qui s’y trouveront en valent la peine, et je n’excepte aucune partie, pas même le cœur ni la tête.

Cette disposition procède du désir que j’ai toujours eu d’être utile à la société, et en même temps d’une foy ferme et éclairée sur la résurrection du corps qui m’assure qu’elle s’accomplira certainement, quelque chose qui soit arrivé à mon cadavre et de quelque manière qu’il ait été divisé.

Ceux qu’on met dans des terres où ils se conservent exempts de pourriture n’ont pas plus de droit à ce bienfait général que N.-S. J.-C. a assuré à tous les hommes et dont il leur a donné un gage non équivoque par la sienne, que ceux qui ont été dévorés par les bêtes, ou brûlés et leurs cendres jetées au vent.

La compassion des parens qui s’opposent quelquefois à ces opérations d’anathomie est une fausse compassion. Le corps est une partie de nous-même, le tems qu’il est uny à notre âme ; mais aussitôt qu’il en est séparé, ce n’est plus l’homme. Son âme qui, seule par sa nature, est capable de bonheur ou de malheur, n’est plus affectée de ce qui luy arrive, et par conséquent c’est un manque de foy dans les vivans que de s’en occuper. Un mort n’a besoin que de leur prière.

Je choisis pour lieu de ma sépulture le Val-de-Grâce où sont déjà enterrées ma femme, ma fille et ma sœur, Mlle de Beaujolois. Cette disposition n’est qu’en cas que je meure à Paris ou aux environs. S’il arrivoit que j’en fusse éloigné de plus de quatre lieues, on m’enterreroit dans la paroisse du lieu où je mourerois.

En quelque lieu que je meure, mon enterrement se fera sans aucune cérémonie ny tenture, soit dans l’église ou dans la maison où je mourrai, à la réserve de la chambre où l’on viendra prendre mon corps pour le porter en terre, dans laquelle je trouve convenable qu’il y ait une tapisserie noire, mais seulement telle qu’on la met dans les antichambres des Princes vivans qui portent de grand deuil. La tapisserie emporte les sièges.

Comme j’ay remarqué que le poids du cercueil de plomb