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tirée du capitaine Renaud, l’officier à la canne de jonc, de Servitude et Grandeur militaires, Nolly a visiblement hésité devant cette morale stoïque, qui est la vraie, et qu’il connaissait bien pourtant. Sans doute il jugeait avec raison qu’elle serait peu goûtée par la majorité des lecteurs, à l’époque où il écrivait. Le présent est héroïque non seulement dans ce qu’on sait, mais souvent aussi dans ce qu’on ne sait pas. La mentalité naturelle, le tempérament foncier de la France ont de nouveau surgi. L’avenir saura, du moins il faut l’espérer, dégager ces exemples et les méditer comme il convient. Mais il y a deux ou trois ans, ne l’oublions pas, la situation des auteurs était tout autre. Nolly s’est adapté tant bien que mal à une ambiance qu’il subissait, sans en partager ni les erreurs ni les illusions.

Les critiques, qui avaient généralement observé un discret silence sur les premiers romans de Nolly, élevèrent la voix quand parut le Chemin de la Victoire, et, la plupart, sans indulgence. Négligeant les idées généreuses, utiles, qui communiquaient un intérêt réel à cette œuvre, ils s’attardèrent à relever des négligences d’écriture, évidemment fâcheuses, mais, qui n’ôtaient à l’ouvrage ni sa valeur, ni sa signification.

L’un de ces critiques tenait Nolly pour un romancier incapable. Hiên le Maboul et la Barque annamite répondent à cette assertion hâtive. Un autre se gaussait, non sans esprit d’ailleurs, du besoin d’apostolat qui incitait les officiers à écrire, parfois si incorrectement. De plus, leur idéalisme lui semblait tout particulièrement plaisant. Ce dernier critique doit moins sourire de cela aujourd’hui. Comme tout le monde, mieux, j’en suis convaincu, que tout le monde, mis en présence des événemens, il s’est pénétré de la nécessité de certaines idées, et sans nul doute, à cette heure, il sait gré à ceux qui les professèrent, ces idées, qui les proclamèrent, quand elles n’étaient pas encore à la mode. Si, selon-une opinion assez admise, les idées mènent le monde ou tout au moins contribuent à sa marche, il ne saurait être indifférent ni déplacé que, de temps à autre, les officiers écrivent.

Les amis de Nolly eux-mêmes doivent reconnaître cependant, avec la sincérité qui est la marque de la véritable affection, qu’au Chemin de la Victoire manque le fini harmonieux, la langue sûre et musicale de la Barque annamite, cette sorte de chef-d’œuvre. J’y reviens. Il faut me pardonner. Il y a dans