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faire remarquer qu’ils ont constitué les États-Unis fortement créanciers de l’Europe, de la France en particulier. Cet effet a été d’autant plus sensible que la compensation qu’amènent en temps ordinaire les dépenses effectuées, de ce côté-ci de l’Océan, par les voyageurs n’a presque pas joué, la guerre ayant retenu chez elles la plupart des familles qui venaient régulièrement passer dans l’Ancien Monde une partie de la belle saison.

Nous ne saurions entrer ici dans la description de l’industrie américaine, qui embrasse une variété considérable de domaines. Elle est remarquable sous plusieurs rapports, par l’énormité des entreprises, par le développement, poussé jusqu’à ses dernières limites, du machinisme et des outils mécaniques : on cite des usines où d’immenses appareils, mus par l’électricité, sont mis en mouvement, réglés et surveillés par une demi-douzaine d’ouvriers. Avec leur hardiesse de conception et leur rapidité d’exécution coutumières, les Américains ont été amenés à centraliser les diverses branches d’une industrie, à grouper sous une même direction le plus grand nombre possible d’établissemens similaires, à réunir dans une seule main la production, le transport et la vente d’un objet. C’est ce que fit par exemple le célèbre Rockefeller pour le pétrole. La puissance ainsi concentrée éveilla la jalousie des pouvoirs publics, qui prirent ombrage et mirent en mouvement l’arsenal judiciaire et législatif pour combattre ces magnats, dont l’empire s’étendait principalement aux chemins de fer. L’histoire des réseaux, de leur formation, de leurs rivalités, de leurs ententes, forme une des pages les plus intéressantes de celle de la civilisation moderne. Nous ne pouvons ici qu’en évoquer le souvenir. Aujourd’hui, les fusions de compagnies, qui paraissaient, à un moment donné, devoir répartir entre un tout petit nombre d’entreprises colossales la totalité du réseau américain, ne sont plus possibles. Plusieurs compagnies ont été contraintes d’abandonner le contrôle de lignes dont elles s’étaient rendues maîtresses. Elles subsisteront dans leur forme actuelle, à moins que l’étatisme ne gagne les États-Unis a leur tour, et que, dans cette démocratie remuante, où, pendant longtemps, l’initiative privée était souveraine, nous n’assistions au rachat, par la Confédération, des sociétés particulières.

Les États-Unis devraient cependant être rcconnaissans aux