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Ce n’est pas par hasard que les Allemands ont occupé, et gardent encore, avec toutes les usines belges, les deux tiers de nos charbonnages du Nord et de nos gisemens de fer lorrains. Si le malheur nous eût fait succomber, la première « rectification de frontière » qu’on nous eût imposée nous eût dépouillés de nos minerais de fer lorrains, qu’ils regrettent si amèrement d’avoir méconnus en 1871. Ayant tant de charbon, il leur faut du fer pour l’utiliser. Ne serons-nous pas en droit, les événemens ayant tourné autrement, de rétorquer l’argument et de dire qu’à tout notre minerai de fer il faut une partie de leur houille ?

Car de la houille, ils en ont maintenant à foison, démesurément et pour des siècles. Ils en ont trop ! Les récentes campagnes de sondages, fondées sur les derniers progrès de la géologie, qui n’ont à peu près rien donné en France, ont sérieusement enrichi l’Angleterre, la Belgique et la Hollande ; elles ont, je l’ai dit déjà, doublé ce que possède l’Allemagne, C’est ce que l’on ne sait pas assez en dehors des spécialistes ; c’est ce qu’il faut dire très haut, parce que, si rien n’est changé à notre avantage dans la situation actuelle, la France, qui pliait déjà sous le faix, va être accablée.

Le bassin westphalien est le prolongement du bassin français et du bassin belge ; mais, en France, le sillon houiller est limité entre deux murs distans au maximum de 12 à 15 kilomètres, et l’on a eu beau chercher, aucune intelligence humaine ne pouvait découvrir ce qui n’existait pas : il a fallu se contenter de glaner entre ces murs. Quand on arrive aux limites de la Belgique et de l’Allemagne, quand on dépasse Aix-la-Chapelle et Maestricht, on entre au contraire dans un immense carrefour souterrain. Les bassins houillers s’étalent ou se branchent en divers sens sur près de 180 kilomètres de long et 100 kilomètres de large. Là se trouvent les nouveaux bassins belges du Limbourg et de la Campine, les bassins hollandais du Limbonrg et du Brabant, les bassins allemands de Wurm-Inde, de Bruggen et de la rive gauche du Rhin. A partir de ce moment, au lieu de couches très redressées et rapidement approfondies, on a des couches à pente plus douce, qui s’étendent très loin vers le Nord. Cet état de choses s’accentue encore en Westphalie. Les recherches par des sondages dans le sens du Nord s’y imposaient donc. On ne s’y heurtait qu’à des