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train de le perdre. Nos lignes de défense sont plus solidement organisées et les barrages d’artillerie bien établis partout. La surveillance de nos officiers, de nos hommes ne se dément pas un instant.

Il en résulte que la plupart de leurs attaques (et Dieu sait s’ils en font) échouent.

Tantôt les Allemands, après un jet de bombes et de grenades sortent, en formations serrées, de leurs tranchées. En quelques secondes, une pluie d’obus, de balles, s’abat sur eux. Les voilà obligés de regagner bien vite leurs trous, non sans laisser un grand nombre des leurs devant les parapets.

D’autres fois, ils s’avancent à la sape afin de diminuer pour leurs troupes le chemin à parcourir. Mais ces sapes sont de véritables tombeaux pour ceux qui les creusent. Nos soldats, en effet, ne cessent pas d’y jeter des bombes qui tuent tous les occupans.

Il s’établit ainsi sur tout notre front une activité incessante, une infatigable vigilance qui, de plus en plus, détruisent dans leur germe tous les projets d’offensive des Allemands.

On comprend toute la tension d’esprit, toutes les fatigues qui sont par-là même imposées à nos troupes et à leurs chefs, Dans les tranchées de première ligne, les soldats sont jour et nuit sur le qui-vive. Ils restent dans la boue, dans l’eau, soumis à une fusillade, à un jet de projectiles continu. Imaginez ce qu’est cette existence.

Le sifflement des obus et des balles fait, dans la forêt, une musique étrange, fantastique. Dans ces étroits ravins, les moindres bruits se répercutent avec une amplitude et une sonorité inaccoutumée. Les troupes de réserve devant être aussi près que possible de la première ligne, les soldats ne peuvent guère se reposer davantage. Quant aux cantonnemens de repos, ils sont presque tous soumis, cela va sans dire, à un assez violent bombardement.

Mais qu’importent toutes ces fatigues et ces dangers ? Le moral de nos hommes n’en demeure pas moins admirable. C’est quelque chose de miraculeux, de sublime, devant quoi il faudrait se mettre à genoux ! Songez que, même les jours où il n’y a pas de combat important, les pertes en tués et blessés se chiffrent assez souvent par centaines. J’assistais l’autre jour à la revue d’un régiment qui revenait