Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 29.djvu/627

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
EN ARGONNE

LA BATAILLE DANS LA FORÊT

11-15 janvier. — Depuis une dizaine de jours notre corps d’armée, fatigué par les violens combats qu’il vient de livrer dans les Flandres, sur les bords de l’Yser et dans la région d’Ypres, est au repos entre Montdidier et Amiens.

Au sortir des Flandres boueuses, cette contrée sèche, nette, riante, sur les confins de la Picardie et de l’Ile-de-France, nous fait l’effet d’un vrai paradis.

Voici donc des bourgs et des villages qui ne reçoivent pas leur part quotidienne d’obus, des maisons que le bombardement n’a pas éventrées, de bons lits où l’on dort d’un heureux somme sans presque entendre le canon. Et surtout voici les belles routes de France, larges et bien assises, où deux et trois voitures peuvent passer de front sans risquer de verser. C’est peut-être à ses belles routes que le Français tient le plus.

Nous nous doutons bien que notre repos sera de courte durée.

Mais sur quelle partie du front va-t-on nous « appliquer ? » Dans les environs de. Reims où nous avons été déjà ? Dans la région de Châlons, en Alsace ? Tous les faiseurs de pronostics, ont beau jeu. A quoi bon cependant se creuser la cervelle quand il est si simple d’attendre ? Un de ces jours, une de ces nuits arrivera le petit télégramme qui lèvera tous les doutes….


Le télégramme est arrivé. Il nous envoie à la…e armée, dans l’Argonne. L’embarquement des troupes commence aussitôt.