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qui s’y fait reste dans la marge du commerce général sur le commerce spécial, en ne profitant d’aucun des traitemens de faveur réservés aux produits du commerce spécial, à raison des charges qui sont imposées à ce dernier.


III

On sait que la zone franche (ou le port franc) n’est pas une combinaison théorique, qu’elle a existé et qu’elle existe. Un rapide coup d’œil sur la franchise dans le passé et le présent est nécessaire à l’étude complète de cette institution[1].

A toute époque, le commerce a eu besoin de liberté et les franchises spéciales dont jouissaient les foires ont. beaucoup aidé au succès de ces rendez-vous commerciaux et à l’activité des transactions qui s’y faisaient. Encore aujourd’hui, l’achat d’un cheval en foire exonère le vendeur des responsabilités pour certains vices rédhibitoires qu’il encourait pendant un délai déterminé si la vente était faite hors foire. Le mot forain veut plutôt dire hors des règlemens que hors du territoire ou qu’étranger ; car les foires se tenaient dans le royaume et non pas seulement sur ses frontières et étaient fréquentées par des nationaux et des étrangers, tandis que toutes les transactions qui s’y faisaient échappaient à l’étreinte rigoureuse des règlemens.

L’histoire économique du port de Marseille est le récit des réactions de la liberté des. transactions contre les difficultés administratives et surtout contre les obligations fiscales et leur cortège de formalités.

La plus célèbre des réactions est due à l’initiative de Colbert, qui fit rendre par Louis XIV en 1669 l’édit de franchise du port de Marseille. Le territoire de la ville bénéficiait de la franchise comme le port et, à sept kilomètres du centre de la cité marseillaise, s’élève une petite chapelle encore appelée Notre-Dame de la douane parce que le poste où se dédouanaient les marchandises marseillaises entrant sur le territoire douanier était aux environs de cette chapelle. La franchise du port et du territoire de Marseille a peut-être un peu nui au développement administratif de la ville qu’elle maintint en quelque sorte à

  1. Voyez Ports francs d’autrefois et d’aujourd’hui, par Paul Masson. Hachette et Cie, Paris, 1904.