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Les mêmes principes d’utilité publique décident si la zone franche doit être commerciale, commerciale et industrielle, ou essentiellement commerciale et accessoirement industrielle. Il s’agit toujours de faire, en zone franche, ce qui ne peut pas être fait en territoire douanier et ce qui, toutefois, peut se faire à l’étranger sans notre concours, c’est-à-dire, nous l’avons vu, partiellement contre nous.

Il est impossible, vu le monopole de l’Etat, de fabriquer des allumettes sur le territoire douanier. Pourquoi faut-il abandonner la fourniture en allumettes des débouchés d’exportation aux pays étrangers, ou à l’Algérie ; et ne pas fabriquer des allumettes en zone franche ? Il est impossible d’en apercevoir la raison. Nous ne sommes pas de ceux qui veulent empêcher nos colonies d’exercer leur activité dans toutes les voies légitimes, mais nous estimons aussi que la même liberté doit être laissée à la Métropole et que les très louables efforts faits par l’Algérie pour acclimater sur son territoire la fabrication des allumettes chimiques ne doivent pas nous empêcher de nous livrer à cette industrie, si nous y trouvons intérêt et si nous pouvons le faire sans porter atteinte au monopole existant, — toutes réserves faites au point de vue de la légitimité et des avantages de ce monopole.

Ce qui est vrai pour les allumettes l’est aussi pour les tabacs, les cigarettes, dont nous avions autrefois un grand débouché à l’exportation, débouché que le monopole nous a fait perdre et que les zones franches seraient à même de nous rendre en partie.

La construction des navires, leurs réparations, peuvent aussi s’interdire ou se faire en zone franche suivant que les navires français peuvent ou ne peuvent pas se construire ou se réparer à l’étranger. Il n’est pas équitable qu’un constructeur en zone franche bénéficie pour les navires construits par lui des avantages qui sont, pour le constructeur en territoire douanier, la rançon et la compensation des charges spéciales qu’il subit ; mais il n’est pas non plus avantageux à notre pays qu’on ne puisse pas faire sur son territoire ce qu’on a toute liberté de faire hors de France, quitte à traiter, à la francisation ou au retour sur le territoire douanier, le navire, construit ou réparé en zone franche, comme on accueillerait le navire construit ou réparé à l’étranger.