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trahira son alliée. — La Convention de Londres, l’engagement pris par la France, l’Angleterre et la Russie de ne pas signer une paix séparée, la glorieuse bataille de la Marne du 5 au 12 septembre, ruinèrent ces grandes espérances.

Plus révélatrice encore apparaîtra la conduite des socialistes allemands, durant leur passage à travers la Belgique écrasée et martyrisée. Pas un blâme dans leurs journaux sur les crimes de Louvain et d’ailleurs, excusés à titre de justes représailles, de nécessité imposée par la guerre « capitaliste. » D’ailleurs les Alliés commettent aussi des excès.

Sous l’uniforme de soldats, de sous-officiers, voire d’officiers, les socialdémocrates font partie de l’armée d’invasion. L’Humanité a publié le récit d’une visite à Anvers de quelques-uns des plus notoires, auxquels les Belges refusèrent de tendre la main. Le député Wendel s’était, avant la guerre, cantonné dans la polémique antimilitariste ; au Reichstag, il avait reproché à la diplomatie allemande sa servilité à l’égard de l’Autriche, poussé le cri de : Vive la France ! Noske, député de Chemnitz, brillait parmi les révisionnistes (réformistes) combatifs. Le docteur Koster était l’un des principaux rédacteurs de l’Hamburger Echo, organe de la droite socialiste. Ils engageaient les ouvriers belges, et particulièrement les employés des P. T. T., à reprendre le travail, en leur promettant la faveur des autorités allemandes. Ceux-ci préféraient recourir à leurs conseillers municipaux, à leurs échevins, plutôt qu’aux représentans des massacreurs et des incendiaires. Nous abrégeons le récit d’une conversation suggestive entre un socialiste belge et le camarade Koster, en présence du camarade Noske. « Vous n’aviez qu’à nous laisser passer, disait Koster, vous eussiez été indemnisés, assurés d’obtenir le suffrage universel, nos lois de protection et d’assurance ouvrières… Vous noua reprochez notre offensive, mais si la Russie ne voulait pas la guerre, c’est qu’elle n’était pas prête ; encore quelques années, et elle nous aurait attaqués… » Son interlocuteur lui répond : « La guerre est l’œuvre du militarisme prussien, que vous, socialdémocrates, combattiez en temps de paix, et on se demande ce qui serait advenu si les camarades français avaient pu mettre obstacle à l’alliance russe, alors que vous reniez tous vos principes… » — Koster ne peut comprendre la résistance des Belges, assez naïfs pour préférer au bien-être matériel, à