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IMPRESSIONS DE GUERRE ALLEMANDES
EN 1870

Au moment où toutes les forces de la France se tendent contre l’invasion pour la repousser, toutes ses pensées se tournent vers les envahisseurs pour tenter de les mieux connaître. On aimerait à savoir quel état d’esprit a inspiré leur conception de la guerre, à pénétrer le secret de leurs forces et de leurs faiblesses morales, à apprendre d’eux-mêmes les motifs de leur présomption du début et les raisons de leurs inexplicables cruautés. On interroge à cet effet les rares carnets de route que les hasards de la lutte ont fait passer de leurs mains dans les nôtres, et l’on voudrait dès maintenant pouvoir consulter et comparer les récits dans lesquels ils résumeront leurs impressions après la campagne.

S’il est vrai que l’histoire se répète toujours, il n’est pas impossible de tromper cette impatience et de préjuger les résultats de cette enquête. Il y a quarante-cinq ans déjà, la France a reçu la visite d’ennemis dont beaucoup nous ont laissé le témoignage écrit de ce qu’ils y ont vu et ressenti. D’une génération à l’autre, les traits distinctifs d’une race et d’une armée ne se modifient pas assez profondément pour qu’il soit inutile de chercher dans les souvenirs des pères l’explication des questions soulevées par l’œuvre des fils.


I

Cette étude est facilitée par l’extraordinaire développement qu’a pris au-delà du Rhin la littérature de la guerre de 1870. De tous les Européens, l’Allemand est peut-être celui qui