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villages de la rive droite avait beau ne présenter qu’une importance secondaire, il fallait essayer de rétablir une situation avantageuse, bien que fragile. Déjà l’amiral Ronarch avait, dans ce dessein, envoyé sur le flanc allemand un de ses vaillans bataillons : le Grand Quartier général belge voulut donner plus d’ampleur à cette opération et joignit aux fusiliers marins notre 17e brigade, leur ordonnant une vigoureuse attaque qui, poussée sur le front Beerst-Vladsloo, dans la direction du Nord-Est, avec comme objectif un bois d’une importance stratégique considérable, le Praet-Bosch, au bord de la route de Tourhout, devait paralyser l’avance des Allemands et forcer même ceux-ci à abandonner leur marche sur le fleuve. Cette offensive commença brillamment. Soutenue par six batteries du 3e régiment d’artillerie qui se portèrent à Kapelhoek au Nord de Dixmude, le 3e chasseurs s’avança sur Vladsloo qu(il occupa, les fusiliers marins à leur gauche reprirent une seconde fois Beerst à la baïonnette ; à droite, le 1er de ligne se dirigea sur Bovekerke. L’ennemi, surpris et désemparé, s’enfuit précipitamment vers le Praet-Bosch et les bois de Couckelaere. Un vent de victoire passait. On bondissait en avant. A gauche, on entendait crépiter l’offensive de la 1re division de cavalerie et du 2e grenadiers qui montaient vers Staden ; on savait qu’un corps de cavalerie française et la 6e brigade anglaise, poussant plus loin encore leurs progrès, venaient d’attaquer Roulers. Les courages s’exaltaient. « Le moment est venu de chasser de notre chère patrie…, » avait dit le Roi. Le moment était venu !… Hélas ! il fallut bientôt déchanter. Les cavaleries alliées, surprises en pleine avance, se retiraient déjà devant le XXIIIe corps débouchant de Roulers ; à notre tour, nous étions menacés par lui. L’ordre fut donné de nous replier, abandonnant à elle-même la 4e division que nous étions allés secourir. La retraite se fit en silence, dans le soir. Il se mit à pleuvoir longuement, finement, tristement. Une boue glissante couvrit les chemins. Dixmude était, au terme du retour, une pauvre silhouette longue et noire. Les fusiliers marins voulurent, en rentrant, reprendre leurs positions abandonnées le matin, ils les trouvèrent occupées par deux de nos régimens de ligne, le 11e et le 12e, envoyés pour les relayer, sous les ordres du colonel Meiser. Quand les vainqueurs de Beerst, mouillés et fâchés, passèrent au milieu des Belges, ils furent accueillis par