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ce dont les indigènes ont besoin, comme si les manufacture » d’Europe n’existaient pas, mais tout au moins en élaborant, par des procédés perfectionnés, des matières premières telles que la canne à sucre, non susceptibles d’une exportation lucrative en raison soit de leur défaut de conservation, soit du prix excessif du transport et en préparant les produits bruts avant leur exportation afin d’augmenter leur valeur marchande et d’en rendre le transport moins coûteux. C’est ainsi que l’installation d’appareils frigorifiques dans les trains et dans les bateaux augmenterait la valeur du bétail en permettant de transporter sa viande en Égypte et en Europe.

De même l’épuration des gommes, l’égrenage et le pressage du coton, le tannage des peaux, etc., faciliteraient beaucoup le commerce extérieur de ces marchandises.

La question du crédit ne manquera pas de se poser à mesure que les terres recevront de nouvelles cultures, que l’élève du bétail sera pratiquée avec méthode et que les industries indigènes se développeront. Pour réaliser ces améliorations, agriculteurs et artisans auront besoin d’avances, et il importe qu’ils les trouvent à des conditions qui ne soient pas usuraires. Le gouvernement égyptien a cru résoudre le problème en provoquant la constitution, avec des capitaux anglais (plus de 200 millions), d’une Banque Agricole dont l’objet était de faire aux fellahs égyptiens de petits prêts qui furent consentis sans demander aucune garantie quant à l’emploi des sommes avancées. Le résultat a été que les prêteurs ont gaspillé ces avances en dépenses improductives et se sont, pour la plupart, trouvés appauvris de leur montant. A l’heure actuelle, on fait en Égypte ce par quoi on aurait dû commencer, en y organisant des sociétés coopératives rurales de crédit. Cette expérience devra profiter au Soudan. Une tentative très intéressante y a été entreprise il y a six ans. Le Trésor prête, aux indigènes possesseurs de terres, les sommes nécessaires à l’amélioration de leur fonds. Ces avances ont lieu par l’entremise des gouverneurs sur la garantie des terres du débiteur ou d’une caution en cas d’insuffisance de celles-ci. Elles se réalisent en nature, c’est-à-dire sous la forme des fournitures ou animaux désirés par l’emprunteur, à moins qu’il ne prouve avoir déjà acquis les unes ou les autres. Les résultats de cette combinaison semblent heureux, et on peut souhaiter qu’elle soit pratiquée sur une plus large échelle.