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œuvres des maîtres de la science, ou bien il suffit d’appeler leur attention sur certaines questions dont la solution paraît pouvoir être fructueusement abordée. Ce n’est pas à dire que ceux qui ont la charge d’esprits à former et à développer ne doivent leur inculquer l’habitude du travail méthodique, mais cela est tout autre chose que de donner, sous prétexte de travail scientifique, des devoirs à faire, comme il arrive souvent dans les Universités allemandes.

Dans les applications industrielles de la science et dans le commerce, les conditions sont différentes, et l’organisation systématique rend les plus grands services ; c’est ici que de grands laboratoires de science industrielle sont nécessaires. Nous ne faisons pas de difficultés pour reconnaître que nous avons là beaucoup à faire. Malgré d’heureuses tentatives, la pénétration ne s’est pas suffisamment établie chez nous entre la science et l’industrie, et les efforts n’ont pas été suffisamment coordonnés. La faute en est sans doute à la fois aux savans et aux industriels, mais cette grave question est trop en dehors du cadre de notre étude pour être abordée ici, et la compétence me manquerait pour la traiter. Elle est d’ailleurs extrêmement complexe, et tient par certains côtés à la politique, particulièrement à la politique financière. Rappelons-nous aussi que, en Allemagne, la pensée du Deutschland uber alles a été un puissant ferment pour le développement de l’industrie qui s’est élevée ainsi au-dessus des intérêts particuliers et est devenue une affaire nationale, objet de la préoccupation constante des pouvoirs publics ; c’est, pour les Allemands, un des moyens de dominer le monde que de l’asservir à leurs produits. Sans prétentions à la domination universelle, nous saurons, espérons-le, nos alliés et nous, reprendre les places commerciales d’où nos voisins nous ont chassés depuis quarante ans, et celles où ils se sont plus récemment installés. Ces conquêtes seront une conséquence nécessaire de la victoire de nos armes et contribueront à réparer les ruines accumulées par la barbarie de nos ennemis.

Tout en cherchant une meilleure utilisation de nos forces dans certaines directions et une meilleure organisation, nous laisserons aux Allemands les vues mystiques sur l’Organisation (avec une grande lettre), qui sont en honneur chez eux. Car, là encore, nous retrouvons la philosophie allemande ; le concept