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coton dans ces explosifs, mais les ingrédiens principaux sont des produits de la houille. Des hommes de science éminens ont fait des déclarations erronées à ce sujet. Ces personnages feraient bien mieux de ne parler que des branches de la science qu’ils connaissent particulièrement. »

On devine aisément l’effet que peut produire cette affirmation dans un moment ou de puissans intérêts privés luttent en Angleterre contre la mesure si hautement et tenacement préconisée par l’illustre Ramsay et qui consisterait à déclarer le coton contrebande de guerre. Cette affirmation, — d’ailleurs littéralement exacte, — tendrait, lorsqu’on la lit hâtivement et sans préparation technique, à laisser croire que le coton n’est pas indispensable à la préparation des explosifs de guerre. Elle constitue un des mille exemples que nous pourrions citer de la nécessité qu’il y a à apporter, pour le public, en évitant de s’empêtrer dans les fils de fer barbelés d’une discussion trop technique, un peu d’ordre dans ces notions dont tant de gens parlent inconsidérément. C’est ce que je tenterai dans cette brève étude.


Qu’est-ce d’abord qu’un explosif ? J’ai voulu le demander à un des régens de notre langue, à Littré. Mais, dans son Dictionnaire ce mot ne figure pas comme substantif, ce qui était peut-être admissible il y a cinquante ans, mais ne l’est plus aujourd’hui que, par la force souveraine de l’usage, ce nom a été définitivement incorporé à notre langue. J’ai cherché alors ce que Littré appelle une explosion ; il la définit : « Action d’éclater avec un bruit instantané, produite par une inflammation brusque ou par une décomposition spontanée, ou par l’excès de tension d’une vapeur. » Il ne me restait plus qu’à me reporter au mot éclater. Littré le définit : « Faire explosion… » Nous voilà bien avancés I Ainsi dans Littré lui-même on trouve de ces définitions qui se renvoient la balle, pareilles au serpent symboHque qui se mordait la queue et n’avait plus ni queue ni tête.

Quoi qu’il en soit, on pourrait, croyons-nous, définir les substances explosives de la façon suivante qui semble englober tous les faits connus : Substances qui tendent sous des influences variées à occuper très brusquement un volume beaucoup plus grand et, partant, à projeter vivement les objets matériels qui les entourent.

Quant à ces diverses influences, on peut très bien les ramener toutes aux trois causes qu’invoque Littré : 1° Excès de tension d’une vapeur. C’est cette cause, purement physique, qui fait exploser par