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charge ne représentait plus que le cinquième du total, exactement 18 pour 100. Cette proportion était tombée encore plus bas, en 1908, année pour laquelle elle ne dépassa pas 11 pour 100. C’était l’époque où la rente 4 pour 100 atteignit ses plus hauts cours. Le crédit italien était alors établi à un niveau supérieur à celui de plusieurs grands États européens ; sa rente était cotée dix points plus haut que celle de l’empire allemand. Celui-ci, cependant, ne perdait pas de vue la proie tentante que constitue la péninsule baignée par l’Adriatique et la Méditerranée. Il n’épargna aucun effort pour tirer avantage du refroidissement que la politique crispinienne avait amené dans les rapports franco-italiens et pour avancer les affaires de son commerce, de sa banque, de son industrie.

Mais quel contraste entre le concours amical que nos capitalistes et nos financiers avaient donné au jeune royaume lors de ses débuts, et la politique d’invasion sournoise et de pénétration soi-disant pacifique que les Allemands poursuivaient ! Le lecteur a pu remarquer, dans l’énumération des sociétés étrangères qui opèrent en Italie et dans l’addition des capitaux dont elles y disposent, la modestie du chiffre des unes et des autres en ce qui concerne l’Allemagne : 22 sociétés, 27 millions, tandis que la France est représentée par 65 sociétés avec 100 millions de capital taxé ! Et cependant, voici ce que M. Giovanni Preziosi écrivait il y a quelques mois dans une brochure : La Germanie à la conquête de l’Italie, qui fit grand bruit : « Le phénomène de la pénétration allemande en Italie est d’une gravité impressionnante. Le pangermanisme tend à la domination financière, à la destruction graduelle de nos industries, à l’asservissement politique, à l’annexion. Comme elle l’était au Moyen Age, l’Italie doit redevenir un État vassal de l’empire germanique : il existe déjà des cartes où elle figure sous ce titre. Il est heureux que la guerre ait éclaté à un moment où nous n’étions pas encore complètement les esclaves du despotisme teuton. »

L’Allemagne, tout en excitant l’Italie contre la France, qu’elle représentait comme la Puissance qui voulait troubler la paix européenne, s’efforçait d’arrêter l’expansion industrielle de nos voisins, de mettre la main sur les Compagnies de navigation, de les empêcher de servir les intérêts nationaux et de les subordonner à une volonté étrangère. En étudiant l’histoire