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S’il avait avantage à se défiler dans ses rapports avec les animaux, il en avait souvent autant dans ses rapports avec ses semblables. La tranchée d’attaque ou de défense prit naissance : on s’y tenait abrité, prêt à repousser les ennemis à coups de pierres ou de flèches. Mais c’est seulement après l’établissement de groupemens humains ayant quelque cohésion, que se formèrent des agglomérations plus ou moins défendues par des murs et des fossés, et qu’eurent lieu des guerres un peu étendues, comportant quelque stratégie et une certaine technique dans les procédés de combat. Il est du moins permis de le conjecturer.

Ce qui est certain, c’est que l’esprit inventif de l’homme primitif lui fit faire de rapides progrès. Sans doute, tout n’est pas de lui dans ces progrès. Il a pu copier, s’inspirer des méthodes des animaux, et leur emprunter la galerie.

Est-ce la taupe qui lui donna des leçons ? ou bien le lapin ? Toujours est-il que, dès le début de l’époque romaine, en 430 avant l’ère chrétienne, d’après Tite-Live, Servilius, assiégeant les Etrusques dans Fidènes, ne trouva rien de mieux que de creuser, de son camp jusque sous la citadelle assiégée, une galerie souterraine par laquelle ses soldats débouchèrent au cœur de la ville dont ils s’emparèrent sans peine. Voilà un exemple de mine, de mine offensive.

Mais la mine défensive date aussi d’une époque reculée. Sous Philippe II de Macédoine, au ive siècle avant Jésus-Christ, la contre-mine était connue. On savait, si l’assiégeant poussait des mines ou galeries souterraines contre la ville, établir une contre-mine : un fossé profond, en avant des remparts, où l’on accumulait du bois. Dès que les mines des assiégeans arrivaient à ce fossé, on mettait le feu au bois, que l’on couvrait de mottes de gazon. De la sorte, la fumée, refoulée dans les galeries ennemies, asphyxiait les occupans. Certains stratégistes y lâchaient des essaims d’abeilles, on dit même des ours et bêtes féroces, — à Themiscyre par exemple (68 ans avant Jésus-Christ), — ou bien des choses malpropres ou incommodantes. A Apollonie, l’assiégé put repérer la direction des mines de l’assiégeant, et creusa des puits qui communiquaient avec elles, puits par lesquels il versa de l’eau et de la poix bouillantes, des vidanges et du sable rougi au feu.

Dès cette époque, le problème des écoutes était posé, et résolu. Le bruit des mineurs se propage à une certaine distance