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qui finirent par gagner des avantages militaires importans, mais qui ne se sont pas distingués par un respect scrupuleux de la propriété privée, même étrangère.

Au blocus financier, décrété contre lui, Huerta répondit par la suspension du service de la Dette extérieure ; bien que la plupart des porteurs de ces titres soient en Europe, des intérêts nord-américains engagés au Mexique ne sont-ils pas atteints indirectement par cette décision ? Le président Wilson s’obstine ; il assure qu’il en veut à Huerta seul, estimant que la « moralité est le principe qui doit le guider, » et que le maintien au pouvoir d’un général arrivé par la violence est un fait intolérable d’immoralité ; il entend mériter le titre que lui a décerné le général constitutionnaliste Villa, de « meilleur ami du peuple américain ; » il proteste contre l’idée que les événemens du Mexique pourraient valoir aux Etats-Unis un agrandissement territorial quelconque ; il tient avant tout à la paix… Cependant le commerce des armes, frappé d’embargo en mars 1912 par le président Taft, est de nouveau déclaré libre (février 1914) ; sur un incident minime, survenu à Tampico, et pour lequel Huerta offrait des excuses, l’amiral Fletcher occupe Vera Cruz (avril) ; les Chambres américaines, la veille de cette démonstration militaire, avaient accordé au président Wilson le droit de recourir à la force, s’il le jugeait nécessaire.

Pour les témoins impartiaux et de sang-froid, la politique de Washington au Mexique a manqué de clairvoyance ; la doctrine de Monroe prescrit-elle d’imposer à tout le continent l’ordre nord-américain, il faut alors que la nation en ait les moyens matériels, qu’elle soit avertie des frais dans lesquels elle s’aventure, des risques de tous genres qu’elle va courir. Déchiré par la guerre civile, appauvri et couvert de ruines, le Mexique accepterait-il un gouvernement vassal de celui de Washington ? Si, sur la menace d’une intervention yankee ; un tel gouvernement se constituait, serait-il durable ? Aurait-il une autorité suffisante pour rétablir la tranquillité civile dans toutes les provinces ? La protection, plus ou moins clandestine, des Etats-Unis n’a pas porté bonheur aux constitutionnalistes : Huerta et ses amis ont bien abandonné le pouvoir et quitté Mexico ; le chef de leurs adversaires, Carranza, est entré dans la capitale (15 août) ; mais le voici brouillé avec son lieutenant Villa ; le meneur d’une sorte de jacquerie, Zapata, se maintient