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Petites-Antilles hollandaises. Maison veillait à Washington ; il suffit de quelques expressions d’inquiétude pour qu’aussitôt Guillaume II déclarât qu’il ne méditait aucune annexion territoriale en Amérique, et envoyât le prince Henri témoigner ses sympathies aux États-Unis. Ceux-ci, satisfaits de ce premier succès, s’emploient à renouer les relations diplomatiques rompues entre le Venezuela et la France ; ils veulent écarter de ces rivages toute démarche trop pressante d’une Puissance européenne quelconque ; grâce à leur intermédiaire officieux, et en échange de l’octroi de notre tarif minimum aux cafés vénézolans, une garantie de 13 pour 100 des douanes est affectée, par priorité, au règlement des créances françaises, telles qu’un arbitrage prévu les aura définies. Pour faire respecter l’intégrité politique d’une république sud-américaine, les États-Unis s’arrogent ainsi délibérément une mission d’ « honnêtes courtiers. »

Mais des complications vénézolanes renaissent : Guillaume II, qui s’était fort bien passé de l’amitié anglaise tant que dura la guerre du Transvaal, vient visiter son oncle Edouard VII, dès que la paix est faite. Peu de semaines après, une flotte anglo-allemande, bientôt rejointe par des croiseurs italiens, vient présenter au Venezuela une note de réclamations conjointes, et lancer quelques obus sur Puerto-Cabello. L’amiral américain Dewey s’empresse de concentrer son escadre des Antilles et, certainement, on s’inquiète à Washington plus qu’à Caracas de la démarche belliqueuse des trois Puissances d’Europe. Celles-ci seraient disposées à s’en remettre à un arbitrage de Washington ; très habilement, le président Roosevelt se décharge sur le tribunal de La Haye des épineuses fonctions d’arbitre ; il ne veut pas s’exposer à prononcer un jugement qui consacrerait, vis-à-vis de l’Europe, une diminution d’une république américaine… Mais d’ores et déjà, le résultat souhaité est atteint, l’action directe de l’Europe est paralysée. Peu importe, désormais, que l’Allemagne, impatientée, fasse bombarder Maracaibo par la Panther, alors que les négociations sont ouvertes ; les États-Unis sont assurés d’une transaction qui n’engagera que les finances du Venezuela ; c’est ainsi, en effet, que sont rédigés les protocoles de février 1903, affectant un tant pour cent des douanes à la garantie des réclamations anglo-italo-allemandes. Un renfort inattendu était venu, pendant ces litiges, à la