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hostilités, et, de l’autre bord, les républicains, tout naturellement attirés vers notre république et vers l’Angleterre démocratique, aucun autre parti ne se range nettement sous les étendards des Alliés ou sous les aigles d’Autriche et d’Allemagne. Vouloir classer les groupes et les sous-groupes libéraux ou conservateurs d’après leurs sentimens envers les belligérans serait une entreprise chimérique. Et à quoi bon ? Il va de soi que la plupart des membres influens de ces groupes, tous partisans de la neutralité, ne compromettront pas leur situation intérieure en se prononçant ouvertement pour ou contre les Alliés, tant qu’ils ne seront pas certains de l’issue de la guerre. Plusieurs d’entre eux, comme le député nationaliste catalan M. Corominas, ou le député conservateur M. Martinez Ruiz (en littérature Azorin), professent, nous le savons, des opinions personnelles très arrêtées et tout à fait en notre faveur, qu’ils n’hésitent pas, au reste, à faire connaître à l’occasion ; d’autres, au contraire, estiment de leur devoir de ne pas donner leur pensée en pâture aux discussions plus déchaînées que jamais de la presse espagnole. Respectons cette réserve, et, pour en finir avec la politique, sachons gré au président du Conseil des ministres, M. Dato, de sa conduite très loyale et des mesures strictes qu’il a su prendre, dans des circonstances particulièrement difficiles, pour faire respecter la neutralité qu’a proclamée son gouvernement.


Comme bien l’on pense, le clergé espagnol séculier ou régulier ne nourrit pas envers la République française des sentimens fort tendres. La séparation chez nous de l’Eglise et de l’État, la dissolution de divers ordres religieux, qui ont été chercher par-delà les monts un asile, l’esprit sectaire fomenté par beaucoup de nos gouvernans et l’intervention de la franc-maçonnerie dans l’avancement des officiers au temps funeste du général André, tout cela nous vaut, dans la presse religieuse espagnole, les épithètes d’Etat impie, d’Etat athée et combien d’autres encore ! Les prêtres et les religieux espagnols englobent-ils aussi dans leur réprobation la nation française ? Certains laïques traditionalistes ou de l’extrême droite, qui ont la haute main sur une partie des journaux catholiques, le voudraient et s’y emploient activement. Ce sont eux qui ont