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facilement glisser vers l’Ouest sur de multiples voies ferrées. Ce sont les deux premiers, avec celui de Coblence, qui ont franchi la Meuse et attaqué Liège, sous la direction du général von Emmich, chef réputé, commandant à Hanovre. L’état-major n’a certainement pas attendu l’ordre de la mobilisation générale pour concentrer cette avant-garde à Cologne et à Aix-la-Chapelle.


VI

Le gouvernement belge, dès les premiers jours du conflit austro-serbe, n’avait pas hésité à prendre les mesures de précaution et de vigilance, que commandait la situation exposée de la Belgique. Le 29 juillet, l’armée était mise sur le pied de paix renforcé ; deux jours après, mobilisation générale ; 180 000 hommes étaient rappelés sous les drapeaux. Grâce à la promptitude de ces décisions, l’orage qui se préparait en secret ne nous a pas surpris sans défense.

Le Cabinet de Bruxelles a ignoré cependant, — comme moi à Berlin, — le marchandage auquel s’est livré le gouvernement allemand, pendant les dernières péripéties de la crise, pour arracher à l’Angleterre la promesse de rester neutre. La France et la Belgique, tour à tour, en ont fait les frais. Le chancelier, dans son entretien du 29 juillet avec sir Ed. Goschen, s’était borné à assurer que notre pays conserverait son intégrité territoriale, sans garantie pour son indépendance et pourvu qu’il ne prit pas parti contre l’Allemagne. Cet engagement devait suffire, pensait-il, à retenir les Anglais, peu disposés à affronter les dangers d’une guerre continentale et n’ayant à redouter ni le démembrement de la France ni la disparition du petit royaume belge, dans le rôle passif de spectateurs désintéressés. Tout de même, le 4 août, au matin, comme il a appris que la Belgique s’apprête à une résistance vigoureuse, le chancelier comprend la nécessité de calmer les esprits à Londres par une grosse surenchère. Il télégraphie à l’ambassadeur allemand de dire bien vite à sir Ed. Grey qu’en tout état de cause, l’Allemagne ne s’annexera aucune partie du territoire belge. Le même jour, dans l’après-midi, inquiet du silence britannique, il répète au Reichstag, en l’amplifiant, l’assurance donnée à l’Angleterre s « Tant qu’elle