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LES
PRÉLIMINAIRES D’IÉNA

Le chevalier Frédéric de Gentz, né à Breslau le 8 septembre 1764 et mort le 9 juin 1832, était le fils d’un employé de la Cour des Monnaies de Prusse et d’une Berlinoise de la famille des Ancillon[1]. Après ses premières études à Breslau, il vint à Berlin au gymnase Joachim, où son père était devenu trésorier. S’étant fait remarquer par ses talens précoces d’écrivain, il alla compléter ses études de droit et de philosophie à Kœnigsberg. Là, il fut séduit par les doctrines de Kant et fit de l’ « Impératif catégorique » son principe de direction et de vie. « C’était, dit l’un de ses biographes, le moyen le plus sûr de marcher sur des pieds solides ; » mais il tempérait la rigueur des préceptes kantiens par une tendance naturelle à appliquer en même temps les doctrines épicuriennes. En 1785, secrétaire particulier du comte de Schulenbourg au Directoire Royal, puis attaché aux bureaux de la Guerre, il apprit à fond l’anglais et le français et suivit avec une curiosité attentive le mouvement révolutionnaire qui emportait la France vers de nouvelles destinées. Attiré en même temps vers la carrière diplomatique, il renforçait ses études politiques par la lecture et l’annotation des écrits de Burke, Mallet du Pan, Mounier et Jean-Jacques Rousseau. L’histoire l’intéressait fort aussi et il reste de lui des Essais peu connus sur Marie Stuart, parus à Berlin en 17994 Entre temps, il fondait la Neue Deutsche Monatschrift et l’Historischer Journal. A l’avènement de Frédéric-Guillaume III, qui avait la tâche redoutable de succéder au grand Frédéric, il

  1. Voyez sur Frédéric de Gentz l’étude de Challemel-Lacour dans la Revue du 1er juin 1868.