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d’appareils évaporatoires. Encore convient-il de ne leur demander que des efforts modérés.

C’est peut-être, — je dis peut-être, — l’insuffisance de la durée d’un séjour précédent à Malte qui entraînait la nécessité d’une sensible réduction de vitesse. Ne perdons pas de vue, d’ailleurs, que l’escadre légère de l’armée navale croise depuis neuf mois. C’est déjà beaucoup. Combien de centaines, de milliers de milles marins ces bâtimens feront-ils encore ?…

Je passe rapidement sur une troisième hypothèse, qui est que l’une des machines du Léon-Gambetta pouvait être momentanément paralysée. Comme il y a là un fait précis, aisément vérifiable, les témoignages des mécaniciens sauvés du naufrage y porteront, s’il y a lieu, une pleine lumière.

Peut-on admettre encore qu’étant relevé par un autre croiseur cuirassé quarante-huit heures environ avant la date fixée pour son retour à La Valette, le Léon-Gambetta calculait qu’à la vitesse de 7 nœuds, il ne lui fallait, après tout, que quarante-trois heures pour parcourir les 300 milles qui séparent de Malte le cap Santa Maria di Leuca ? Je ne le pense pas. Le contre-amiral Sénés avait trop de jugement pour ne pas apprécier à sa juste valeur le danger de s’attarder dans des parages fréquentés par les sous-marins.

Mais, justement, se pensait-on, pouvait-on se penser aussi exposé, dans la nuit du 27 avril, alors qu’on se trouvait déjà à 260 milles environ de Castelnuovo di Cattaro, base secondaire extrême, du côté du Sud, des sous-marins autrichiens ? L’armée navale disposait-elle de renseignemens suffisamment précis sur les facultés des nouvelles unités de cette catégorie que nos adversaires méditerranéens ont reçues assez récemment, affirme-t-on, du chantier Germania de Kiel ? Je l’ignore. En tout cas, si c’est bien le U5 (ou le U6, exactement semblable) qui a torpille notre croiseur cuirassé, la question ne se pose pas. Ce bâtiment figurait déjà, au début des hostilités, dans l’Adriatique. Ce n’est qu’à partir du U7 jusques et y compris le U11, que l’on se trouve en présence des grands sous-marins (700-900 tonnes) fournis par l’Allemagne. Tout ce que l’on peut se demander, c’est si le U5 et le U6 ne venaient pas d’être achevés et s’ils étaient bien connus de nos croiseurs.

On voit quelles sont nos incertitudes quand il s’agit d’un bâtiment français. Dans le cas de la Lusitania, les choses se