accompagnée ou suivie. S’il a eu tort ou raison de se taire, nous n’avons pas à l’examiner aujourd’hui. On a dit, — et cette assertion étonne, — que les cruautés commises par les Allemands n’étaient pas encore suffisamment prouvées aux yeux de certains Américains. Que leur faut-il donc de plus ? En tout cas, des attentats monstrueux comme celui qui a fait périr le Lusitania et son équipage sont d’une clarté telle qu’ils n’ont pas besoin d’un supplément d’information. Le crime a un tel caractère d’évidence que les circonstances en importent peu. Aussi aimerait-on à entendre une voix américaine qui, reprenant tout le passé sur lequel le présent jette de si vives lumières, vengerait l’humanité outragée, la civilisation bafouée, la justice offensée en énonçant dès aujourd’hui le jugement de l’histoire. Ce vœu sera-t-il exaucé ?
Quoi qu’il en soit, chacun de nous doit continuer sa tâche au poste où il se trouve placé et les Alliés poursuivront vigoureusement la leur. Il y a quelques jours, M. le Président de la République et M. le président du Conseil recevaient une députation irlandaise qui était venue proclamer la solidarité de l’Irlande avec les combattans continentaux et dont l’affirmation éloquente peut se résumer en un mot : Jusqu’au bout ! L’Allemagne, à la veille de la guerre, comptait sur l’Irlande pour diviser le Royaume-Uni et le paralyser, et précisément c’est l’Irlande qui se charge d’exprimer aujourd’hui la résolution énergique dont tous nos cœurs sont pleins. Qu’on cherche d’ailleurs sur toute la ligne de bataille des Alliés, on ne trouvera nulle part de défaillance : partout, au contraire, la même volonté persiste avec ce surcroît de force que donne le sentiment de plus en plus ardent de l’indignité morale de l’adversaire et des réparations qu’elle impose. Chez nous, toutes les fois que l’occasion s’en présente, le Gouvernement et les Chambres manifestent avec éclat cette volonté. C’est ce qui est arrivé, il y a quelques jours, au Palais-Bourbon. M. le ministre des Finances demandait à la Chambre l’autorisation d’élever à 6 milliards de francs la limite d’émission des Bons du Trésor et de la Défense nationale et à autoriser la création, pour un maximum de 1 milliard 50 millions environ, d’autres bons destinés à être escomptés par le gouvernement anglais. M. Ribot a tenu à faire part à la Chambre de la situation financière dans toute sa vérité, et c’est un tableau assez sévère : son discours contenait quelques avertissemens qui devraient amener un peu plus de prudence dans nos dépenses. La négociation poursuivie à Londres avec M. Lloyd George montre que notre crédit a besoin de ménagemens particuliers par le