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disputationibus eorum. Excepté lorsque l’Allemagne, par une tactique à laquelle elle a eu recours en plusieurs occasions, a cru bon ou habile de se glisser en tiers entre les Alliés, dans l’espoir sans doute, soit de gêner leur action, soit de leur en ravir le bénéfice.

L’une des premières applications de l’alliance franco-russe fut, à la fin de la guerre sino-japonaise (1894-1895), l’intervention des deux Cabinets de Saint-Pétersbourg et de Paris auprès de la cour de Tokyo et le conseil amical donné au Japon de ne pas maintenir dans la paix de Shimonoseki la clause relative à l’occupation de la presqu’île du Liao-toung et de la forteresse de Port-Arthur. — L’Allemagne, par la tactique à laquelle je viens précisément de faire allusion, se joignit à la France et à la Russie, d’abord sans doute pour ne pas laisser les deux alliés dans leur tête-à-tête qui l’inquiétait, mais aussi avec des arrière-pensées qui ne tardèrent pas à apparaître, dont l’une était de se procurer à elle-même en Chine de gros avantages et un durable établissement, et l’autre d’engager la Russie dans les entreprises d’Extrême-Orient, de la détourner ainsi de l’Orient musulman et, si c’était possible, de l’Europe. — La tentation de l’Extrême-Orient a été l’un des prestiges, l’un des sortilèges dont l’Allemagne a le plus usé et abusé pour affaiblir alors la Russie. Après s’être jointe à la Russie et à la France dans l’intervention qui suivit la paix de Shimonoseki, après s’être installée elle-même deux ans après, sous le prétexte du massacre de deux de ses missionnaires, dans le. port de Kiao-tcheou d’où les Japonais viennent de la chasser, après avoir été par son occupation d’une partie du Chan-toung l’instigatrice de la redoutable insurrection des Boxeurs, c’est elle qui, en poussant la Russie à s’établir à Port-Arthur, préparait le conflit entre la Russie et le Japon, et qui, en même temps, pour mieux assurer à ce conflit l’issue qu’elle désirait, poussait le Japon à s’unir à la Grande-Bretagne. — Les papiers posthumes publiés à Tokyo en 1913 après la mort du comte Hayashi, le signataire de l’alliance anglo-japonaise de 1902, ne laissent aucun doute sur le rôle joué en cette circonstance par l’Allemagne qui pensait avoir trouvé dans ces complications d’Extrême-Orient l’un des plus sûrs moyens d’énerver l’alliance franco-russe et de la mettre en opposition, en lutte avec l’Angleterre. — La justice immanente a voulu que ce fût précisément l’alliance