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minutes. Un effet aussi foudroyant ne peut se produire que par l’action d’une mine.

Quelles dispositions avait-on prises pour parer à ce très grave danger des mines automatiques ?

On avait beaucoup dragué et on pensait sans doute l’avoir fait avec un plein succès. Mais peut-il y avoir un plein succès en pareille matière, alors que, dans les intervalles des travaux des dragueurs, interrompus par le mauvais temps, l’adversaire a la faculté de mouiller de nouvelles mines ? Supposons toutefois qu’il ne puisse user de cette faculté. Il reste qu’on ne saurait l’empêcher ni de laisser aller au fil de l’eau, au moment de l’attaque décisive, des torpilles dérivantes, ni de garder en réserve, pour les lancer à point nommé sur les grandes unités qui se décideraient à franchir le seuil du goulet, des torpilles automobiles disposées d’avance sur des radeaux à tubes-carcasses, immergés à la profondeur de 3 à 4 mètres.

C’est que la défense par les engins sous-marins a des ressources nombreuses. Encore ne les énuméré-je pas toutes. Mais, quelles qu’elles soient, ces ressources s’évanouissent entre les mains des défenseurs, lorsque ceux-ci sont obligés d’abandonner leurs ouvrages à terre et d’évacuer la frange littorale. C’est évidemment le résultat que l’on comptait obtenir par le bombardement, direct ou indirect, exécuté par les vaisseaux. L’expérience a montré qu’à ce mode d’action, dont on ne doit pas méconnaître aujourd’hui la valeur, il fallait en joindre un autre, l’intervention d’un corps de troupes suffisamment considérable et pourvu des engins nécessaires au bombardement, — facile d’ailleurs, — d’ouvrages de côte pris à revers.

Facile, viens-je de dire. A condition, toutefois, que l’on n’ait pas laissé à la défense le temps d’organiser, en arrière de la ligne des batteries de côte et sur les crêtes mêmes d’où on les pourrait battre, des batteries de circonstance, des fortins, des blockhaus, des observatoires, des routes militaires où circulent trucs à obusiers, autos-mitrailleuses, autos-canons, etc., etc. à condition encore qu’on ne lui ait pas donné tout le loisir de rassembler une véritable armée sur le point menacé. C’est ce que j’écrivais ici même, non seulement il y a quelques semaines (n° du 1er avril), mais il y a plus de deux ans (n° du 1er janvier 1913).