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son fils de la fièvre maligne, avait proposé un diagnostic et une ordonnance ; ou comme si, lorsque nous adressons au ciel ce vœu : « Donnez-nous aujourd’hui notre pain quotidien ! » nous avions préparé un menu ! Ces hommes si jaloux des affaires temporelles et laïques, si inquiets de l’intervention de l’Église, lui reprochent maintenant de manquer de précision dans ses démarches. On les verra, si l’Église prie pour la France, demander : Quelle France ? et s’inquiéter de savoir si elle a eu soin de mentionner le dernier ordre du jour voté par la majorité.

Prier n’est pas allumer un cierge dans un sanctuaire pour gagner aux courses dimanche prochain. Les vœux que l’homme adresse à Dieu laissent à la Providence divine plus de latitude. En ce moment il n’est pas un de nous, Français, qui ne repousse, même au prix de sa vie, une paix boiteuse, éphémère et indigne. Mais en quoi ce sentiment est-il blessé, et quel homme raisonnable peut éprouver de l’étonnement ou de l’inquiétude, quand nous apprenons cette nouvelle : Le Pape au nom de l’humanité, au milieu de la plus horrible guerre, a adressé ses prières à Dieu, pour la Paix !


II

Je m’excuse en vérité d’avoir écrit trop longuement pour le livre de Mgr Baudrillart une sorte de préface. Le rôle du critique se réduisait à bien peu de chose en présence d’un ouvrage composé par des auteurs dont le talent est connu et dont les sentimens sont, avec les miens, en si parfaite conformité. Je n’ai pas résisté à la tentation de leur offrir une collaboration plutôt que de juger leur œuvre.

Moi aussi, après avoir été pendant tant d’années un témoin, j’ai voulu, avec eux, rendre hommage à la persévérance de la France catholique, contre laquelle les tracasseries politiques n’ont obtenu aucun succès. Il a été parlé de déchristianiser la France ; je voudrais être sûr qu’en d’autres pays l’entreprise fût aussi impraticable qu’elle l’est chez nous !

Comme critique du recueil de Mgr Baudrillart, je n’ai que des vœux à exprimer. Puissent en Italie en Espagne ou ailleurs les esprits chagrins, qui doutent de la France catholique, lire les pages signées « Un Missionnaire ! » Pourquoi nous cache-t-il