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Elle en était déjà sortie. L’intervention de l’empereur de Russie, les pressantes exhortations de la reine d’Angleterre à l’empereur d’Allemagne avaient produit leur effet. A Berlin, à Saint-Pétersbourg, à Londres, nos ambassadeurs en recueillaient des preuves non équivoques. De Berlin, le vicomte de Gontaut-Biron écrivait que l’Empereur lui avait tenu les propos les plus rassurans et que, rencontrant noire attaché militaire, M. de Polignac, il lui avait dit :

— On a voulu nous brouiller ; mais maintenant, c’est fini-.

Quelques jours plus tard, au moment où le prince de Hohenlohe, venu pour quelques jours à Berlin, allait se mettre en route pour Paris, le vieux souverain lui avait laissé entendre que le mal était venu surtout « de la mauvaise attitude de la presse. » Il avait reconnu que les articles hors de toute mesure publiés par les journaux auraient pu avoir des suites funestes, c’est-à-dire amener la guerre.

— Ces gens-là sont de grands coupables par l’exagération de leurs propos.

Il semblait vouloir ainsi leur attribuer tout le mal et croire à leur entière indépendance, alors que chacun savait quel empire le chancelier exerçait sur la presse allemande et l’habileté avec laquelle il en usait.

— Heureusement, maintenant tout est fini, reprenait-il. L’empereur de Russie, quand j’ai eu le plaisir de le voir, a pu s’en convaincre et se rendre compte sur place de l’inanité des bruits répandus. En congédiant son ambassadeur, Guillaume Ier lui avait recommandé de saluer, de sa part, le maréchal de Mac Mahon : — Dites-lui que vous n’êtes pas le seul messager de paix, que le vrai messager de paix est ici.

De Saint-Pétersbourg, le général Le Flô avait fait savoir que le Tsar, en partant pour Berlin, s’était attaché à le rassurer.

— Tout se calmera, je l’espère. En tout cas, vous savez ce que je vous ai dit. Je ne l’oublie pas et je tiendrai. Et serrant la main au général, il avait renouvelé sa promesse : — Au revoir, je me souviendrai et j’espère qu’il n’y aura pas de surprise.

Les deux empereurs se rencontraient à Berlin le 11 mai. A la suite de leur première entrevue, le prince Gortchakoff annonçait à ses ambassadeurs, à Paris et à Londres, que la paix ne serait pas troublée. Le même jour, le Tsar écrivait à une