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Il est juste, d’ailleurs, de ne pas les réserver soit aux indigens, soit même aux travailleurs manuels et aux petits employés. Les charges d’une nombreuse famille sont aussi sensibles dans les situations moyennes, plus sensibles peut-être, par suite du coût d’une éducation non gratuite, plus soignée et plus prolongée, qu’il faut donner à chaque enfant. C’est dans la petite bourgeoisie et parmi les petits propriétaires que la multiplicité des enfans impose le plus de privations, qu’elle entraîne le plus de risques d’une sorte de déchéance sociale et qu’elle est le plus redoutée, en fait. C’est là aussi que se recrutent les élites laborieuses qui sont les véritables auteurs du progrès social. Limiter à de trop faibles revenus les exonérations ou les allocations réservées aux pères de famille, c’est, à la fois, manquer à la justice et enlever à cette législation une grande partie de son efficacité.

Il est facile de préciser, par un certain nombre d’exemples, les applications innombrables qui pourraient être faites de ces principes. Les avantages de chacune d’elles pourront sans doute paraître bien minimes pour être efficaces ; mais l’ensemble constituerait un total d’avantages sérieux et créerait bien vite un état d’esprit propre à modifier les dispositions d’un grand nombre de familles.


Au point de vue fiscal, l’application la plus facile, qui a déjà pris place dans nos lois, concerne la contribution mobilière. Cette contribution, proportionnelle à la valeur locative de l’habitation de chaque famille, est une sorte d’impôt sur son revenu, évalué d’après le signe extérieur qui répond le moins mal à ses ressources. C’est un impôt de répartition, en sorte qu’à l’intérieur de chaque commune, les allégemens accordés aux uns, dans la répartition individuelle, retombent sur les autres. La loi autorise les conseils municipaux à déduire de chaque loyer, pour cette répartition individuelle, une certaine somme constante ; cette somme peut être augmentée d’un dixième par personne a la charge du contribuable, en sus de la première, jusqu’à concurrence de trois. A Paris, la déduction est de 375 francs pour tous les loyers, plus 37 fr. 50 par personne au-delà de deux. Il y a franchise générale pour les loyers inférieurs à 500 francs, ainsi que pour les pères de sept enfans vivans dont la cote ne dépasse pas 10 francs ; cette