Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 26.djvu/443

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’inspection des services. Ce qui importe davantage, il a réglé sur place les questions relatives à l’amélioration des transports entre Bizerte, Ferryville et Sidi-Abdallah, situé à 23 kilomètres de la ville. Depuis plus de deux ans, les pourparlers engagés entre la Marine, la Compagnie Bône-Guelma, la Direction générale des Travaux publics, n’aboutissaient pas. Cette fois, on a signé des accords, au grand bénéfice de tous.

Le premier décret que signa Mohammed en Nasser, nouveau bey de Tunis (30 mai 1906), délivra enfin la Marine des servitudes qui pesaient sur elle, en lui conférant la direction des mouvemens et l’entretien des ouvrages. L’État versa, pour la durée de la concession, 825 500 francs, à titre de rachat des droits et taxes que la Compagnie du port de Bizerte, la C. P. B., percevait sur les bâtimens de guerre et les vapeurs marchands. Non seulement la Marine acquérait le droit de modifier le barrage des pêcheries, mais elle exonérait la Compagnie de l’entretien des jetées et du maintien de la profondeur du canal ; le tout, contre le paiement de 1 032 000 francs. Enfin, une dernière somme de 120 000 francs était allouée à la C. P. B., pour droit de passage et de mouillage des bâtimens de guerre, en 1903, 1904 et 1905.

Depuis dix ans, le barrage des pêcheries, longue ligne de 1 400 mètres de pieux métalliques plantés en travers de la passe, entre le lac et le goulet, créait une gêne sérieuse pour la navigation. Au milieu du barrage s’ouvrait une porte de 48 mètres de large, simple filet vertical que l’on amenait sur le fond pour laisser passer les navires.

La convention de 1889 astreignait la Compagnie à ouvrir la passe aux bâtimens de guerre, à toute réquisition ; mais, pendant cette ouverture, les recettes de la C. P. B., dorades, mulets et grondins, filaient en bandes serrées, tumultueusement vers la mer, si bien que, de 1891 à 1903, le produit de la pêche tomba de 200 000 à 6 000 francs. Désormais, plus de ces pêches miraculeuses devant des invités de distinction, où fourmillaient au soleil des milliers de poissons prisonniers dans les casiers. Plus de « boutargue » pendue au plafond des séchoirs. Disparu l’Arabe alerte qui accourait pour amener le filet du barrage, au coup de sifflet impératif d’un navire.

La Marine perça dans le barrage une vaste trouée qui resta béante en tout temps. Par ailleurs, l’Amirauté dut pourvoir à