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passage suivant d’un discours, prononcé par lui au Reichstag le 6 novembre 1906 : « C’est la tâche de notre génération de maintenir en même temps notre position sur le continent, qui est la base de notre position internationale, et de protéger nos intérêts au dehors, aussi bien que de poursuivre une politique internationale prudente, sensée et sagement limitée, de telle sorte que la sécurité du peuple allemand ne coure pas de dangers et que l’avenir de la nation ne soit pas compromis. »

Conseils pleins de sagesse ! Mais ces mots, « politique internationale, » « politique d’outre-mer, » « politique mondiale, » qui reviennent continuellement sous la plume de l’ex-chancelier, ne disent rien de précis à notre esprit latin épris de clarté. Une politique mondiale ou internationale consistait-elle, par exemple, à protéger, par la présence de quelques croiseurs sur les côtes du Mexique, les résidens et le commerce allemands que menaçait la rivalité de Huerta et de Carranza ? Ou bien fallait-il appeler du même nom la politique qui a dicté l’envoi d’une escadre dans les mers de Chine, pour s’emparer de Kiau-tchau et de Tzingtau et obtenir de vive force du gouvernement chinois la concession d’une station navale et d’un riche territoire minier, avec la faculté d’y ériger des défenses formidables ? M. de Bülow a senti lui-même le besoin d’éclairer un peu pour ses lecteurs ce que sa pensée a d’obscur. Il nous laisse entendre que l’Allemagne possède maintenant les moyens, non seulement de protéger ses intérêts, de résister à une agression, mais aussi de développer partout sa position, spécialement en Asie Mineure et en Afrique.

La brochure, intitulée : La Politique mondiale et pas de guerre, « die Weltpolitik und kein Krieg, » est plus explicite. Elle ne porte pas de signature, mais sa publication a eu lieu, suivant la version accréditée dans les milieux politiques de Berlin les mieux informés, sous les auspices du ministère des Affaires étrangères, qui n’en a pas désavoué la paternité.

L’auteur anonyme nous expose d’abord les raisons pour lesquelles une guerre continentale ne parait plus à redouter. La confédération balkanique s’est dissoute dans le sang, et les alliés d’hier, devenus des adversaires irréconciliables, mettront du temps, ainsi que la Turquie, à panser leurs blessures et à