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Allemands pour devenir, par leur esprit d’organisation, par leur méthode, par leur travail opiniâtre, les premiers dans presque tous les domaines où s’exerce la concurrence entre nations, les maîtres des principales productions industrielles, et pour acquérir en Europe une hégémonie économique incontestable qu’ils ont été follement demander à une guerre incompatible avec les progrès de la civilisation. Comment un homme aussi éclairé que M. Zimmermann, aussi au courant des desiderata du monde industriel allemand, n’aurait-il pas été un pacifiste ?

La tâche principale des dirigeans du ministère des Affaires étrangères est la même dans toutes les grandes capitales. Il faut être un Bismarck pour préparer de longue main, en conduisant la politique extérieure de son pays, des guerres successives, et son excuse est qu’elles étaient nécessaires à la fondation de l’unité allemande. Son but atteint, le tout-puissant ministre a remis l’épée de la Prusse au fourreau et s’est appliqué à consolider la gloire acquise et les conquêtes réalisées. Le ministère des Affaires étrangères de Berlin ne peut être honnêtement soupçonné d’avoir travaillé dans l’ombre contre le maintien d’une politique de paix, la politique des vingt dernières années du vieux chancelier. Eviter des conflits inutiles, dissiper les nuages dès qu’ils s’amoncelaient en quelque coin de l’horizon, prévenir les conséquences effroyables d’une conflagration européenne, c’étaient bien là, durant ces dernières années, le noble devoir et la tâche ingrate des diplomates, dans le rôle de vigie ou de pilote qu’ils remplissaient à l’étranger ou a la tête du département central. Ces hautes obligations morales, on a dû chercher à s’y conformer à la Wilhelmstrasse comme ailleurs, avec des alternatives de courtoisie et de rudesse, avec des inégalités d’humeur trop apparentes, mais avec des intentions sincères.

Alors un problème embarrassant se pose : en présence des aspirations indéniables d’une partie de la nation allemande, de ses désirs évidens d’expansion, comment le ministère des Affaires étrangères proposait-il de leur donner satisfaction ? Avait-il en vue une politique pacifique d’un genre particulier ?

Un livre et une brochure parus à Berlin en 1913, à l’occasion du jubilé des vingt-cinq années de règne de l’Empereur,