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prudence, avec timidité même, dans la voie de la construction des sous-marins. Ce n’est qu’en 1906 que, grâce à une retouche du programme initial de 1898, on voit apparaître dans le budget de l’Empire les fonds destinés à la mise sur cale de deux sous-marins, l’un au chantier de l’Etat de Dantzig, l’autre au chantier « . Germania » (maison Kriïpp), à Kiel. Ce sont de modestes unités de 180 tonneaux de déplacement en surface et de 240 tonneaux en plongée, qui chauffent au pétrole, marchent sous l’eau avec la vapeur accumulée, donnant 10 nœuds et 8 nœuds, et qui ne s’arment que de deux tubes lance-torpilles. Ces U1, et U2[1] sont des engins de défense des côtes. Ils ne se risqueront certainement pas dans la mer d’Irlande, ni dans la Manche.

On peut en dire autant, très probablement, des six exemplaires du type qui succède à celui de ces deux précurseurs. Les U1, U4, U5, V6, U7 et U8 construits au chantier « Germania » de 1908 à 1910, ne déplacent encore que 230-300 tonnes. Ils vont jusqu’à 12 nœuds en surface et ont 4 tubes, mais leur rayon d’action est encore faible. Ils ne rôderont, ceux-là, que dans la mer du Nord. On ne songeait pas, en 1908, au blocus de l’Angleterre.

En 1911-1912, les choses changent de face tout à coup. Le programme général de construction a subi de profondes modifications. On veut avoir, en 1917, 12 sous-marins, dont 54 toujours armés et 18 en réserve. Le peuple allemand s’est aigri peu à peu contre le peuple anglais. Ses dirigeans, qui veulent servir une haine dont ils ont, au moins, encouragé le développement, commencent à regarder avec complaisance l’engin dont l’amiral anglais Percy Scott, deux ans plus tard, dira nettement que, devant lui, surtout s’il sait combiner son action avec celle des aéroplanes, les cuirassés disparaîtront, balayés ou coulés. Et alors, brusquement, on demande au Reichstag pour les deux exercices 1911-1912, de quoi construire 34 sous-marins ou plutôt 34 submersibles, car, entre temps, on a réussi à se procurer, grâce à un habile, mais assez louche personnage de nationalité étrangère, les plans d’un ingénieur français bien conrui, M. L…

Mais 34 unités à la fois, c’est trop d’ambition. D’ailleurs, il faut tenir compte des progrès si rapides, des moteurs, des auxiliaires, de l’armement. En définitive, on n’exécute, à Dantzig, que

  1. U, initiale de Unterseeboot, bateau sous-marin.