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très vite à faire, de leur territoire de Kiaou-Tchéou, une sorte d’exutoire de la province du Chantoung ; et leurs succès s’accusaient par l’influence défavorable que le voisinage de Tsing-Tao avait eue sur le grand port de Tché-Fou. Ces succès étaient dus, comme toujours, aux améliorations techniques, économiques, introduites par les Allemands sur ce point de la côte de la Chine ; à la réussite de leur chemin de fer mettant en relation l’intérieur de la province avec le littoral. C’est l’occasion de se rappeler un mot par lequel M. B. Von Kœnig terminait l’étude qu’il publiait en 1907 sur les colonies allemandes. Il disait et estimait que « le chemin de fer est plus puissant que le canon. » C’était évidemment au canon, à la violence, aux menaces, à la force brutale que les Allemands avaient dû la conquête matérielle de la baie de Kiaou-Tchéou et de son territoire, en même temps que de la zone neutre ; en même temps aussi que les concessions que le gouvernement chinois leur avait faites plus ou moins bénévolement ; mais c’étaient seulement des facteurs économiques qui leur avaient valu une situation commerciale très enviée et très enviable.

Bien entendu, dans cette partie de la Chine comme dans tout le reste de l’Extrême-Orient ou de l’Océanie, ils n’avaient point en vue que des résultats économiques ; ils étaient animés de cet esprit de domination tyrannique qui a été la cause véritable de la guerre de 1914, et qui les a menés où ils en sont à l’heure actuelle.

Après les efforts heureux qu’ils avaient poursuivis dans une partie de l’Empire chinois, après le rêve qu’ils avaient caressé longtemps de faire du territoire de Kiaou-Tchéou le centre d’une véritable Allemagne asiatique, le réveil a dû être cruel, quand les forces alliées des Japonais et des Anglais ont réussi à supprimer leur domination militaire, commerciale, économique, industrielle, sur le vaste territoire dont ils avaient réussi déjà à tirer un si beau parti.


DANIEL BELLET.